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annales de la société j. j. rousseau

Ces observations suffisent pour me montrer le point où doivent commencer mes recherches ; je ne me tourmenterai point à vouloir trouver pourquoi les astres roulent dans leurs orbites, je n’essayerai pas non plus de rapporter aux principes de la mécanique ni de l’hydrostatique la formation des plantes et des animaux, et je n’imiterai pas ce Chymiste insensé qui osa entreprendre de faire un homme par les opérations de son Art.

Nous voyons le jour et la nuit, la neige et la verdure couvrir alternativement la face de la terre ; nous voyons les eaux dont elle est mélée s’élever en vapeurs par la chaleur du soleil retomber en rosée ou se condenser en nuages et se résoudre en une pluye salutaire qui vient nourrir et ranimer les végétaux languissans ; nous voyons les sucs et les sels qui doivent servir à leur nourriture s’insinuer en eux par une multitude de différens pores : tantôt c’est la terre qui fournit à leurs racines la subsistance nécessaire pour toutte la plante ; de là ces sucs encore cruds et grossiers vont se purifier et se subtiliser dans une infinité de petits Canaux destinés à cet usage, pour se rendre propres à nourrir les parties les plus délicates : tantôt c’est dans l’eau même que le corps de la plante trouve sa vie et sa nourriture ; d’autres par les seuls pores de leurs feuilles et de leurs écorces reçoivent immédiatement de l’air les alimens dont ils ont (59) besoin. Par une mécanique encore plus merveilleuse, les Animaux, au moyen d’une communication particuliére, tirent d’abord de la substance de leur mére l’air, le sang, et les sucs nécessaires à leur accroissement ; des qu’ils sont nés, ce sont d’autres fonctions et une autre mécanique, ils respirent l’air immediatement, ils pourvoyent eux mêmes à leur subsistance ; La nature leur apprend à choisir les Alimens qui leur sont propres et à rejetter ceux qui leur sont contraires, elle les avertit du besoin par le desir. Non moins sage dans la distribution, elle a tellement disposé en eux les organes de la digestion que par un choix et une séparation bien entenduë, il ne