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pour séparer nos principes de recourir a un agent étranger et le plus pénétrant de tous les corps, qui pourra nous assurer que cet agent ne fait réellement que les séparer et qu’il ne contribuë point à les produire ? On sait que la seule action du feu cause non seulement des altérations, mais produit même des corps qui n’éxistoient pas auparavant. Le feu Calcine les pierres, Alkalise les sels, change (7) la couleur et la nature d’une infinité de corps, et il y a même des substances qui exposées au feu le plus leger perdent tellement leur forme et leur consistance qu’elles ne peuvent plus les reprendre par quelque voye que ce puisse être. Pourquoi les principes que nous montrent les opérations chymiques ne seroient-ils pas l’effet d’altérations semblables ? Qui nous assurera que ces sels, ces esprits et ces huiles qui résultent de nos opérations êtoient auparavant dans les substances, tels en qualité et en quantité que nous les en tirons par le secours du feu ? Les détracteurs de la Chymie ont fort appuyé sur cette objection et plusieurs d’entre eux la croyent même sans replique : Cependant, la solution en est simple ; car quoique le feu par de nouvelles combinaisons puisse diviser et réunir différemment les principes des corps, il est certain qu’il ne peut les altérer en eux mêmes, autrement ils ne seroient pas de vrais principes : Mais la source de l’erreur vient d’avoir pris pour Elémens des corps des substances qui ne l’êtoient pas, telles que les sels et les huiles qui sont des mixtes ou des composés. Ainsi, que le feu produise par l’incinération un sel Alkali qui n’êtoit pas auparavant dans la plante de laquelle on le retire, cela ne fait rien contre notre proposition[1] ; puisque cet Alkali n’est qu’une combinaison différente des mêmes principes dont la plante étoit composée, et qui, divisés par le feu, et reunis d’une autre manière, offrent aux sens un nouveau mixte [6] d’ail-

  1. Commencement d’une feuille de copie appartenant à la bibl. de Neuchâtel (fragment 4. bis).