Page:Annales de la société Jean-Jacques Rousseau, tome 1.djvu/100

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

des Confessions. La délicatesse de ce galant homme s’alarma : pouvait-il laisser croire qu’il fût capable de trahir la confiance de Rousseau, en devançant le terme fixé pour la publication des Mémoires ? Il envoya donc au Mercure de France une Déclaration (qui parut dans le n° du 21 novembre 1789), par laquelle il décline toute responsabilité dans l’édition des libraires genevois : « Je suis certain, ajoute-t-il un peu lourdement, que l’ouvrage ne peut avoir été livré ou acquis que par des moyens peu délicats, puisqu’il ne peut être publié aujourd’hui que par la violation de la volonté très expresse de son auteur. »

Cette phrase visait M. de Girardin, qui, à la mort de Rousseau, s’était emparé d’une copie des Confessions que l’auteur avait conservée par devers lui. Mais Barde et Manget, se croyant mis en cause, répondirent par une lettre très vive (27 novembre), adressée à DuPeyrou, qui répliqua le 2 décembre ; le 5, les libraires signaient leur duplique. Tous ces documents furent réunis en une brochure[1]. On y trouve, outre les pièces que nous venons d’indiquer, un garde-à-vous adressé par les éditeurs genevois au public contre l’édition de la suite des Confessions que DuPeyrou avait pris le parti d’annoncer, et que Barde et Manget qualifient à l’avance de contrefaçon. DuPeyrou, en effet, ayant constaté que les éditeurs genevois avaient fait subir au texte original diverses altérations — sous prétexte de faire disparaître « les traits trop amers », — s’apprêtait à imprimer chez

  1. Pièces relatives à la publication de la suite des Confessions de J. J. Rousseau. Voir sur cette affaire les Mémoires de Fauche-Borel I, p. 37-8. Sébastien Mercier, qui avait séjourné à Neuchâtel et fréquenté l’hôtel DuPeyrou, fut un moment soupçonné d’avoir pris copie de la suite des Confessions. Mme  de Charrière entretient d’Oleyres de cette histoire (7 juin 1789).