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appelé Jang-dze-Kiang ; nous voyagions tantôt par des sentiers pratiqués le long de ses bords, et tantôt sur des barques. Ce fleuve ressemble à un bras de mer par sa largeur immense, et quand les vents se mettent à souffler, il s'y élève des tempêtes aussi terribles que sur l'Océan. Un jour, on nous avait donné deux barques : l'une était montée par la plus grande partie de nos conducteurs, nous étions sur l’autre avec le reste de l'équipage. A peine eûmes-nous fait quelques lieues, qu'un orage subit commença à soulever les vagues ; comme c'était un vent arrière, il ne semblait pas dangereux, et nos gens, satisfaits de voir accélérer leur marche, s'en réjouissaient plus qu'ils ne s'en alarmaient. Tout-à-coup une rafale nous prit de côté, et nous fûmes portés sur sa rive, malgré les efforts des matelots qui luttaient avec la rame et de longues gaules pour tenir le large. Arrivés au bord, nous nous aperçûmes que le vent avait repris sa première direction ; l'équipage se remit donc en travail de gaules et d'avirons, et reconduisit la barque jusqu'au milieu du fleuve ; mais à peine y fut-elle, qu'une seconde rafale nous prit encore en flanc et nous ramena au lieu que nous venions de quitter. Nos matelots ne se découragèrent pas et parvinrent de nouveau à gagner le large ; alors le même fait se répéta une troisième fois, et d'une manière si subite, qu'il était impossible de ne pas y voir quelque chose d'extraordinaire. Le patron effrayé, ordonna d'amarrer au rivage, et quoiqu'il ne fût pas encore midi, nous restâmes là tout le reste de la journée. Pour l'équipage de l'autre barque, voyant ce qui nous arrivait et le prenant pour un effet de notre maladresse, il s'en était beaucoup diverti et avait continué sa route. Le lendemain matin, nous pûmes aussi reprendre la nôtre ; mais arrivés à la ville, nous n'y trouvâmes pas tous nos compagnons : peu après qu'il nous eurent