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que le Régent, pour protéger deux hommes nouvellement arrivés, de qui il n'avait rien ni à espérer ni à craindre, ne voudrait pas se jeter, lui et son gouvernement, dans les dernières extrémités, et qu'ainsi condescendant aux vues de l'envoyé impérial, il finirait bientôt par nous signifier lui-même un arrêt de bannissement. En ce cas, nous étions exclus du Thibet par l'autorité indigène, et par là nous perdions tout droit d'y revenir et d'y résider. Nous implorâmes longtemps et avec instance les lumières de l'Esprit-Saint, et après avoir mûrement envisagé notre situation sous toutes ses faces, et pesé toutes ses suites, nous jugeâmes qu'il valait mieux céder pour un temps à l'orage, et nous conserver intacts le droit et l'espoir de rentrer à H'Lassa dans des circonstances meilleures. Le Régent à qui nous fîmes immédiatement part de notre résolution, tout en se montrant affecté à la pensée de notre éloignement, reconnut la sagesse des raisons qui nous y avaient déterminés. Ses paroles nous laissèrent entrevoir que nous ne faisions qu'embrasser volontairement une voie à laquelle il eût été bientôt contraint de nous inviter lui-même, et il nous remercia d'avoir prévenu cette douloureuse extrémité.

Notre départ de H'Lassa eut lieu le 26 février. Partout nous fumes accueillis par les Thibétains avec les marques les plus touchantes d'intérêt et de considération, et nous apprîmes, depuis, que tous les chefs des districts avaient reçu du Régent une dépêche qui leur enjoignait expressément d'en agir ainsi à notre égard.

La partie orientale du Thibet que nous eûmes à traverser, n'est qu'une suite continuelle de rochers escarpés et de précipices ; il fallait les gravir et les descendre sans chemin battu ; souvent le passage était si étroit, que désirant mettre pied à terre pour franchir à pied un pas difficile, l'espace ne le permettait point,