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Les questions qu'il nous adressa ensuite nous firent connaître qu'il craignait d'avoir en nous quelques émissaires politiques, venus pour explorer le pays et en dresser des cartes. Pour dissiper ses soupçons, nous lui protestâmes que notre Religion même nous faisait un devoir inviolable de ne nous immiscer en aucune affaire étrangère à la prédication de nos doctrines. Il parut rassuré à cet égard et finit cette première entrevue par ces paroles remarquables : « Il faut que vous ayez eu de nous une idée bien avantageuse, puisque vous êtes venus ici au prix de tant de fatigues et de dangers. Vous êtes loin de votre patrie ; à défaut de toute protection, moi, je vous servirai d'appui ; personne n'aura à se mêler de vous que moi, et je me charge de vous fournir tout ce qui sera nécessaire à votre entretien et à votre nourriture. Du reste, je vous manderai encore pour m'entretenir avec vous. »

Nous sortîmes d'auprès du Régent le cœur plein d'une satisfaction d'autant plus sensible, qu'elle était plus inattendue. Une voie magnifique nous était donc ouverte au début de notre Mission ; le ciel venait visiblement à notre secours, et nous concevions les plus belles espérances. Notre joie était si grande, que nous nous sentions déjà payés au centuple des fatigues et des longues misères que nous avait coûtées notre voyage. Depuis, nous fûmes très-souvent appelés au palais du Régent, et le temps s'y passait presque exclusivement à parler de Religion. Le Prince examinait les vérités chrétiennes, les comparait, soit avec les enseignements du Bouddhisme, soit avec la doctrine mahométane. L'intérêt qu'il mettait à ces discussions, la bienveillance qu'il témoignait pour nos personnes, allaient toujours croissant. Un jour que la conférence avait été plus vive, il termina l'entretien en prononçant d'un ton grave et pénétré