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Voici quel était le personnel et l'ordre de la petite caravane. Samdadchiemba, notre jeune Lama, monté sur un mulet de courte taille, ouvrait la marche, en traînant après lui deux chameaux chargés de nos bagages ; puis suivait M. Gabet hissé sur une grande chamelle ; un cheval blanc me servait de monture.

Samdadchiemba était notre seul compagnon de voyage. Ce jeune homme n'était ni chinois, ni tartare, ni thibétain. Cependant au premier coup-d’œil il était facile de saisir en lui les traits qui distinguent ce qu'on est convenu d'appeler la race mongolique : une teinte fortement bronzée redoublait l'étrangeté de sa figure presque triangulaire ; un nez large et insolemment retroussé, une grande bouche fendue en ligne droite, donnaient à sa physionomie un aspect sauvage et dédaigneux. Lorsque ses petits yeux noirs sortaient de dessous de longues paupières dégarnies de cils et qu'il vous regardait, en plissant la peau de son front, il inspirait, tout à la fois, des sentiments de confiance et de peur. Rien de tranché sur cette figure : ce n'était ni la malicieuse ruse du Chinois, ni la franche bonhomie du Mongol, ni la courageuse énergie du Thibétain ; mais il y avait un peu de tout cela. Samdadchiemba était un Dchiaour. Plus loin je dirai un mot de la patrie de notre chamelier.

A l'âge de onze ans, ce jeune homme s'était échappé de la Lamazerie où on l'avait placé, jugeant à propos de se soustraire par la fuite aux coups d'un maître, dont il trouvait la correction trop sévère. Il avait ainsi passé la plus grande partie de sa jeunesse errant et vagabond, tantôt dans les villes chinoises, tantôt dans les déserts de la Tartarie. Il est aisé de comprendre que cette vie d'indépendance avait peu poli l'aspérité naturelle de son caractère. Son intelligence était entièrement inculte ; mais en retour, sa puissance musculaire était exorbitante, et