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n’a pas pris froid hier soir. Comment va-t-elle ce matin ? — Et Miss Bates fut obligée de lui répondre avant qu’il consentit à entendre autre chose.

— Je vous suis tellement, tellement obligée, reprit ensuite Miss Bates. — Il l’interrompit : — Je vais à Kingston, puis-je faire pour vous quelque commission ?

— Vous allez à Kingston ? Mme Cole disait l’autre jour qu’elle voulait se faire apporter quelque chose de Kingston. — Mme Cole a des domestiques qu’elle peut envoyer. Puis-je faire quelque chose pour vous, Miss Bates ?

— Non, merci. Mais montez donc. Savez-vous qui nous avons chez nous ? Miss Woodhouse et Miss Smith, qui ont eu la bonté de venir pour juger de notre nouveau piano. Laissez votre cheval à l’auberge et montez.

— Eh bien, dit-il, comme s’il hésitait encore, si je monte, ce sera pour cinq minutes.

— Et nous avons Mme Weston et Mr. Frank Churchill. C’est charmant, une belle réunion d’amis.

— Non, je ne peux pas monter, merci. Je ne pourrais pas seulement rester deux minutes, il faut que je sois à Kingston aussi tôt que possible.

— Oh, je vous en prie, montez! Tout le monde sera ravi de vous voir.

— Non, non, votre pièce est déjà assez remplie de visiteurs ». [1]

Jusqu’au moment où Mr. Knightley lui avoue qu’il a été jaloux du beau Churchill, Emma, — non plus que le lecteur — ne devine la raison de ce brusque changement d’idée et de ce refus donné d’un ton presque cassant.

Ce procédé a un double avantage : il est plus vivant qu’un autre et, chose plus importante encore, il excite l’intérêt du lecteur et lui demande, comme au spectateur, d’une œuvre dramatique, une collaboration incessante et active. Racontés, ces menus incidents dans l’existence de gens qui sont tout simplement d’honnêtes hommes et d’honnêtes femmes, seraient puérils et fastidieux. Mais

  1. Emma. Chap. XXVIII.