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CHAPITRE IV


La psychologie.


À la première lecture, une œuvre comme « Le Château de Mansfield » ou « Orgueil et Parti pris » semble appartenir à ce genre qui, dans le domaine du roman, correspond assez exactement à la comédie de mœurs. L’intrigue et la peinture d’un petit monde aujourd’hui si gracieusement désuet paraissent en former le plus grand attrait. Mais les livres de Jane Austen possèdent une sorte de charme assez semblable à celui dont Goldsmith para jadis une des héroïnes du « Vicaire de Wakefield » : « Les traits de Sophie, dit-il, n’étaient point d’une beauté frappante, mais souvent lui valaient de plus sérieuses conquêtes, car ils étaient doux, modestes et attirants ». On ne trouve point tout d’abord, en parcourant ces romans, de beautés frappantes ; on pense n’y avoir gagné que le plaisir de passer quelques heures aimables auprès de gens heureux et de bonne compagnie. Puis, si on les relit, — et on les relit toujours —, on s’aperçoit que leur comédie de mœurs pourrait bien être en même temps une comédie de caractères.

Sous des dehors amusants et presque frivoles, par delà la valeur toute extérieure que leur donnent l’admirable enchaînement de l’intrigue et l’évocation de la société du siècle passé, on découvre dans leurs pages l’intérêt plus profond, plus captivant, qui s’attache toujours à une étude psychologique lorsqu’elle est, comme celle-ci, délicate, subtile et nuancée. L’action, la parole, l’attitude, qu’on s’était imaginé tout d’abord fixées par l’artiste pour le seul plaisir de reproduire la vie et la réalité, sont, en fait, notées ici avec une scrupuleuse exactitude, moins pour ce qu’elles valent en elles-mêmes que pour ce qu’elles signifient. Cette œuvre qui est d’une