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fication première est presque oubliée. Pour des traditionnalistes comme les Bertram, les Woodhouse ou les Elliot, voyager le dimanche : « Sunday travelling », est une action qu’on juge sévèrement. Il va néanmoins plus de sentiment religieux dans une de ces réunions en plein air où les méthodistes chantent leurs hymnes que dans le plus beau sermon prêché le dimanche à la même époque par un « clergyman », — fût-il même un Edmond Bertram, — dans l’église de Mansfield ou de Highbury.

Mais si la ferveur du sentiment religieux a disparu peu à peu pour faire place à l’indifférence, l’esprit puritain a reconquis ses droits. Dans le domaine de la moralité et de la conduite, la « gentry » est revenue à toute l’austérité, à toute l’intransigeance de jadis. On n’accorde plus à certaines fautes la facile indulgence que la société des villes leur montre encore à cette même époque. Une vie plus étroite dans un cercle composé de membres d’une même famille, d’alliés ou d’amis intimes, ne permet pas au monde des « squires » de tolérer une conduite irrégulière ni de la juger avec indulgence. Le désespoir et l’indignation des Bennet, en apprenant l’équipée de Lydia, indiquent aussi clairement l’attitude et le jugement d’une société dont le code de morale est très strict que la douleur bien naturelle à des parents devant le déshonneur de leur fille. La légèreté et l’imprudence de Lydia sont même envisagées là moins au point de vue de la famille que de la société. Il faut le mariage par lequel se termine l’aventure pour faire oublier à Elizabeth et à Jane ce que l’inconduite de leur sœur avait d’humiliant pour elles. Dans « Le Château de Mansfield », la faute de Maria Bertram est infiniment plus grave et ses conséquences plus désastreuses. L’intrigue de Maria, une fois divulguée, cause un scandale dont les deux coupables ne sont pas seuls à souffrir. Il ne s’agit plus ici d’un enlèvement qui, à la fin du xviiie siècle, est chose assez fréquente et aboutit le plus souvent à un mariage. Maria est la femme de Mr. Rushworth et quitte son mari pour suivre l’homme