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le révérend Elton, rencontrant alors Miss Woodhouse et Harriet qui viennent de porter des secours à une malade, revient sur ses pas et accompagne les deux jeunes filles, remettant à un autre jour une visite de bien peu d’importance à ses yeux, comparée au plaisir de se promener aux côtés de la charmante Emma. Quand bien même le clergyman réside au milieu de ses ouailles, son influence spirituelle est infiniment restreinte. Il nous apparaît dans le roman de Jane Austen, comme une façon de « squire » qui, au lieu de veiller à la culture des terres, veillerait, au nom des hautes classes de la société, à ce que paysans, et fermiers n’oublient pas les devoirs de tempérance, d’obéissance, de régularité dans leur vie et dans leur travail que leurs maîtres jugent indispensables. Presque toute leur existence se passe dans la société de leurs égaux, hobereaux et gens de qualité du voisinage. Vieux et amateurs de bonne chère, ils jouent au whist avec le « squire » du pays et mettent leur orgueil à offrir à leurs invités, choisis parmi la meilleure société des alentours, un dîner plus abondant et plus exquis qu’on n’en sert sur aucune autre table. Jeunes et d’assez bonne tournure pour aspirer à la main d’une fille riche et bien née, leur titre de pasteur est la seule chose qui les distingue des autres jeunes gens reçus à Mansfield par Lady Bertram ou des élégants danseurs qui fréquentent à Bath les salles de bal ou d’assemblée. La religion qu’ils enseignent et à la pratique de laquelle ils engagent leurs paroissiens est séparée de toute aspiration mystique, de tout élan vers un au-delà. Elle n’est rien de plus qu’une morale et surtout une morale sociale, une série de rites traditionnels, une discipline tout extérieure qui remplace la vertu par la bienséance, la charité par la condescendance. Comment cette religion pourrait-elle être autre chose, puisque les seules conditions que doit remplir un candidat à l’ordination, sont, ou d’avoir la protection d’un haut personnage pouvant disposer de bénéfices, ou d’appartenir à une famille qui a droit de nomination à une ou plusieurs cures ? Un