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de toilette anglais ». [1] Dans la première on voit une jeune femme assise devant une poudreuse, enfilant son petit pied dans un soulier de satin bleu. Un jeune homme, un livre à la main, a interrompu la lecture qu’il faisait à la coquette pour répondre à un homme d’âge mûr qui lui expose avec de grands gestes quelque importante questions de philosophie ou de science. Dans la seconde estampe, l’artiste a créé une autre atmosphère. La dame que sa camériste aide à passer une robe, a ses enfants auprès d’elle ; — une fillette qui, un grand livre ouvert sur ses genoux, donne une leçon de lecture à son petit frère — Deux aspects d’un même « siècle de la femme » sont résumés là avec une éloquence qui, pour être un peu partiale, n’est cependant pas sans valeur.

Une réaction très nette contre la licence du siècle précédent s’indique dès le début du xviiie siècle. À chaque nouvelle décade, le mouvement commencé se poursuit, plus rapide à mesure que l’influence féminine s’affirme dans la société et dans le roman où celle-ci trouve à la fois son image et son modèle. Parmi les échanges qui s’établissent alors entre la littérature et la vie, il en est un dont il est difficile de fixer le point de départ : la sentimentalité. Rien de plus éloigné du sentiment, de l’attendrissement et de toutes les formes de l’émotion que l’œuvre d’Addison, de De Foë et de Swift. Dans les comédies de Steele, l’émotion commence à apparaître, timide et mêlée à des passages d’une solennité si grande qu’on est tenté de prendre la comédie pour un sermon. C’est en 1740, avec « Paméla» qu’on entend pour la première fois d’une façon continue la note sentimentale. Fielding, avec « Joseph Andrews », puis avec « Tom Jones », proteste en vain contre la fadeur et la fausseté d’une émotion trop longtemps soutenue. Il montre à ses contemporains le ridicule de ces larmes que versent à chaque page les héros et les lecteurs de Richardson. Mais le bon sens, la gaieté, la robuste franchise de Fielding n’arrêtent pas

  1. « The English Dressing Room » et « The French Dressing Room », gravures au pointillé, par P. W. Tomkins, d’après Chas. Ansell, 1789.