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sans faire des embarras. Aucun amateur n’a consenti à se produire. La maison n’a été vide qu’après minuit. Si vous voulez apprendre d’autres détails, questionnez-moi. Il me semble, pour ma part, que j’ai épuisé, plutôt qu’effleuré le sujet ». [1]

Cependant, il nous manque quelque chose pour avoir une image bien nette de Jane Austen, souriante et animée, au milieu d’un petit groupe de gens qui tous, nous le devinons, subissent le pouvoir de son charme : nous ne savons rien encore de sa toilette. C’est dans la lettre suivante que cette question sera traitée avec une brièveté surprenante. « Ma coiffure était faite d’un bandeau pailleté comme la bordure de ma robe, avec une fleur que m’avait donné Mme Tilson ». L’heureux effet de cet ajustement est indiqué ensuite avec une pointe d’humour : « Je comptais bien qu’il me reviendrait quelque remarque de Mr. W. Knatchbull au sujet de la soirée et me tiens pour très satisfaite du jugement porté sur moi : il m’appelle une jeune personne fort agréable. Il faut se contenter de cela. À l’heure qu’il est, on ne saurait prétendre à rien de mieux et ce sera très heureux si l’on peut prêter à de telles remarques pendant quelques années encore ». [2] Cette réflexion, amusée et mélancolique à la fois, nous rappelle que Jane Austen a maintenant trente-six ans. Mais elle demeure, pour l’invité de son frère, ainsi qu’aux yeux de beaucoup d’autres « une jeune personne». Elle est presque aussi jolie qu’aux jours où elle fleuretait avec son « ami irlandais », Mr. Tom Lefroy et certainement plus charmante, avec plus de grâce, plus de douceur qu’autrefois. Elle est maintenant capable de s’intéresser à certaines choses qui n’appartiennent pas à son milieu. Aussi c’est un plaisir pour elle que de pénétrer en compagnie de sa belle-sœur dans un salon d’émigrés. Elle se réjouit à l’avance de voir « les façons d’une société française ». Après sa visite, elle se déclare satisfaite et loue les manières

  1. Lettres. 25 avril 1811.
  2. Lettres. Mai (?) 1811.