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qu’elle entreprit fut la révision de « Bon Sens et Sentimentalilé ». Son frère Henry ayant réussi à lui trouver un éditeur, elle se rendit à Londres en avril 1811, et termina les derniers arrangements pour la publication de son œuvre. Sans plus oublier « Bon Sens et Sentimentalité » « qu’une mère n’oublie l’enfant qu’elle nourrit », elle jouit néanmoins des plaisirs de la capitale : visites aux musées, aux expositions de peinture, soirées passées au théâtre ou dans le monde. Présentée par sa belle-sœur qui avait été la comtesse de Feuillide, Jane fit alors la connaissance de plusieurs émigrés et pénétra dans un milieu français. Quinze ans auparavant, elle avait fait un bref séjour à Londres « ce lieu de dissipation et de vice » comme elle l’appelait en riant. Elle n’y avait fait depuis que de rares et surtout très brèves visites. Après le calme des journées de Chawton, elle eut alors l’impression de vivre une vie intense. Pour rassurer Cassandre qui aurait pu se croire oubliée ou négligée, elle lui écrivit un jour : « Je suis une vilaine de me laisser absorber au point de sembler n’avoir plus une pensée pour les êtres et les choses auxquels je m’intéresse en tout temps et en toute circonstance, c’est-à-dire à votre milieu et à vous-même. Je vous assure que je pense à vous tous et désire être tenue au courant de tout ce qui vous concerne. Mais, le moyen [1] de ne pas être absorbée par mes propres affaires ? » [2] Londres, en effet, est si attrayant, presque si nouveau pour elle, qui passe de la solitude et du silence du Hampshire au mouvement des rues bruyantes, au spectacle des étalages où se déploient d’irrésistibles chiffons. La note de gaieté, de joyeux empressement qui se fait entendre dans sa correspondance à cette époque indique, aussi bien que le contenu des lettres elles-mêmes, que Jane Austen vécut pendant sa visite à Sloane Street dans une fièvre de mondanités. « J’ai le regret de vous apprendre que je fais des dépenses folles. Je gaspille tout mon argent, et le vôtre

  1. En français dans le texte.
  2. Lettres. 18 avril 1811.