Page:Annales de l universite de lyon nouvelle serie II 30 31 32 1915.djvu/151

Cette page n’a pas encore été corrigée

Paris où, en février 1791, il fui arrêté pour avoir suborné des témoins, et en parliculier le secrétaire du Comité révolutionnaire, qui devaient déposer au procès de la marquise de Marbeuf. Le secrétaire du Comité, un certain Morel, sollicité de donner un témoignage favorable à l’accusé, fit d’abord mine de se rendre aux instances et aux promesses du comte, puis le dénonça. La marquise de Marbeuf, son homme de confiance et le comte de Feuillide furent ensemble envoyés à la guillotine. On raconte que Mme de Feuillide était à ce moment à Paris et ne parvint à s’échapper et à passer en Angleterre qu’en courant les plus grands dangers. Mais rien ne prouve le fait et l’on peut également supposer que Mme de Feuillide, dont la mère était morte en 1792, était alors à Steventon chez son oncle où elle reçut la nouvelle de l’arrestation et de la mort du comte, comme les autres habitants du presbytère, Jane Austen fut profondément émue par un si tragique événement. L’impression qu’elle en reçut fut d’autant plus forte qu’elle vit alors Mme de Feuillide en habit de veuve dans cette maison que sa vivacité et son charme avaient emplie de leur rayonnement. Les tristes aventures d’Eliza de Feuillide pourraient servir à expliquer l’invincible répugnance que Jane Austen manifesta désormais à l’égard de tout ce qui était étranger à son milieu et contenait, ainsi qu’elle venait de l’apprendre, sous les apparences de la prospérité et de la joie, une secrète menace d’heures douloureuses et tragiques. Si l’on n’admettait pas cette hypothèse, comment expliquer que, parlant fort bien le français (ses lettres confirment sur ce point le témoignage formel de son premier biographe), et vivant à une époque où l’on rencontrait des émigrés dans tous les milieux anglais, elle n’ait jamais fait figurer de français dans ses scènes de la vie contemporaine ? Dans ses premiers livres comme dans ceux qu’elle écrit à Chawton, elle place à l’occasion et toujours fort à propos, un mot ou une phrase de français ; mais ce qu’elle accorde à la langue, elle le refuse aux personnages. Tout au plus