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que des traces d'acide ou d'alcali, qui ne changent pas appréciablement la viscosité, et d'ailleurs insuffisantes pour agglutiner les grains de caoutchouc, ralentissaient extrêmement leur agitation. Par exemple, dans de l'eau faiblement acidulée, le déplacement moyen devenait environ 9 fois plus petit que dans l'eau neutre, ce qui, pour des grains de même apparence extérieure, eût exigé un diamètre 80 fois plus grand que dans l'eau neutre. Cette énorme variation est complètement inconciliable avec la théorie d'Einstein et plus généralement avec toute théorie qui néglige la nature du fluide inter-granulaire et ne le fait intervenir que par sa viscosité. Autant que j'ai pu juger par la conversation, il se produisit alors, chez les physiciens français qui suivaient de près ces questions, un courant d'opinion qui m'a très vivement frappé, en me prouvant combien est limité, au fond, le crédit que nous accordons aux théories, et à quel point nous y voyons des instruments de découverte plutôt que de véritables démonstrations. Sans hésiter, on admit que la théorie d'Einstein était incomplète ou inexacte. D'autre part il n'y avait pas lieu de renoncer à placer dans l'agitation moléculaire l'origine du mouvement brownien, puisque je venais de montrer par l'expérience, qu'une émulsion diluée se comporte comme un gaz parfait très dense dont les molécules auraient un poids égal à celui des grains de l'émulsion. On se borna donc à supposer qu'il s'était glissé dans les raisonnements d'Einstein quelque hypothèse complémentaire injustifiée.

29. Confirmation expérimentale de la théorie d'Einstein. — Cependant, comme Victor Henri avait seulement estimé le diamètre de ses grains, et comme lui même avait fait des réserves sur la généralité de ses résultats, je pensai qu'