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qu'on se bornait à faire intervenir des molécules invisibles, il demeurait possible, en niant leur existence, de croire à la rigueur parfaite du principe de Carnot. Cela ne serait plus raisonnable, à présent que cette rigueur se trouve en opposition avec une réalité sensible. L'importance pratique du principe de Carnot n'est d'ailleurs pas atteinte, et je crois n'avoir pas besoin d'affirmer longuement qu'il serait imprudent de compter sur le mouvement brownien pour élever les pierres destinées à construire une maison. Mais la compréhension de ce principe si important devient par là plus profonde; on saisit mieux comment il est lié à la structure de la matière, et l'on conçoit qu'on pourrait l'énoncer en disant que la coordination spontanée de mouvements moléculaires devient d'autant moins probable qu'elle porte sur un plus grand nombre de molécules et s'étend sur une durée plus grande (en ce qui regarde la signification générale du principe, je.crois devoir renvoyer aux considérations si intéressantes développées par J.-H. Rosny Ainé, dans son Livre sur le Pluralisme, p. 85-91, F. Alcan, 1909).

5. L'hypothèse moléculaire cinétique. — J'ai dit que le mouvement brownien s'expliquait, dans la théorie de M. Gouy et de ses précurseurs, par les mouvements incessants des molécules du fluide qui, heurtant sans cesse les particules observées, sans que leurs chocs s'équilibrent exactement, promènent irrégulièrement ces particules au travers du fluide. On sait en effet que depuis longtemps et, spécialement pour expliquer les faits de diffusion ainsi que la transformation de mouvement en chaleur, on a supposé non seulement que les corps, malgré leur apparence homogène, ont une structure discontinue et sont formés de molécules distinctes, mais encore que ces molécules sont dans une agitation incessante,