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brownien n'est pas dû à des trépidations transmises au liquide étudié, puisque par exemple il persiste la nuit, dans un sous-sol, à la campagne, aussi bien que le jour près d'une rue populeuse où passent de lourds véhicules. Il n'est pas dû non plus aux courants de convection qui se produisent dans les fluides où l'équilibre thermique n'est pas réalisé, car il ne change pas appréciablement quand on se donne beaucoup de peine pour obtenir cet équilibre. Il faut donc écarter toute comparaison entre le mouvement brownien et l'agitation des poussières qu'on voit danser dans un rayon de soleil. Aussi bien, dans ce dernier cas, il est aisé de voir que des poussières voisines se meuvent en général dans le même sens, dessinant grossièrement la forme du courant commun qui les entraîne, au lieu qu'un des caractères les plus frappants du mouvement brownien est l'indépendance absolue des déplacements de deux particules voisines, si près qu'elles passent l'une de l'autre. Enfin, ce n'est pas non plus l'éclairement inévitable de la préparation qu'on peut incriminer, car M. Gouy put brusquement le diviser par mille, ou changer beaucoup sa couleur, sans modifier du tout le phénomène observé. Toutes les autres causes successivement imaginées ont aussi peu d'action ; la nature même des particules ne paraît avoir aucune importance, et dès lors il est difficile de ne pas penser que ces particules servent simplement à révéler une agitation interne du fluide, ceci d'autant mieux qu'elles sont plus petites, de même qu'un bouchon suit mieux qu'un grand bateau les mouvements des vagues de la mer. Ainsi apparaît une propriété profonde, éternelle, de ce qu'on nomme un fluide en équilibre. Cet équilibre n'existe que de façon moyenne et pour de grandes masses : c'est un équilibre statistique. En réalité, tout le fluide s'agite indéfiniment et spontanément en des mouvements d'autant plus violents et rapides qu'ils concernent des