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conseil des 500 de faire un rapport sur la reproduction des chevaux, et l’amélioration de l’espèce dans le territoire de la république. Mes collègues de cette commission sont : Echassériaux le jeune, Le Borgne, Mainers-Coullion et Jourdan (de la Haute-Vienne) ex-général. Tu pourras annoncer à Villot, artiste vétérinaire à Morlaix, que je suis de cette commission et que je suis nanti de la lettre qu’il a adressée à la députation du Finistère. Nous sommes tous convaincus que l’on devrait rétablir les haras. » [1]


Paris, le 3 nivôse an 6 de la république (23 décembre 1797).
Chère amie,

« Jamais de ma vie je n’ai assisté et jamais je n’assisterai à un banquet pareil à celui du 30 du mois dernier (30 frimaire-20 décembre). Je vis et je mangeai avec le plus grand homme dont les annales aient fait mention ; je nomme Bonaparte.

À quatre heures précises nous devions nous mettre à table. À 6 heures, comme je vis qu’il n’en était nullement mention, je fus avec quatre de mes collègues et le général Joubert[2] prendre un restaurant en attendant le repas ; et fîmes bien.

À 7 heures un (sic) salve d’artillerie annonça que l’on allait se mettre à table. À 7 heures et trois quarts l’on fit l’appel de la manière que je te l’ai annoncée, il y a quatre jours. Pour ne pas être gênés, moi et les autres députés, attendîmes que la foule se passât.

Nous traversâmes à travers de deux haies de grenadiers du Corps législatif qui nous présentaient les armes et des tambours qui battaient la charge, deux ou trois galeries qui contenaient un demi-quart de lieue de long. Au dehors le canon ronflait et au dedans ce n’était que musique.

La salle où se donnait le repas avait au moins deux cents pas de long et mille bougies à tout le petit moins l’éclairaient, et encore l’on a jugé que c’était trop peu.

Le nombre des convives montait à 6 ou 7 cents. Il y avait un servant pour 5 ou 6 mangeurs. L’on a porté 15 toasts. Un chant civique analogue à chaque toast les accompagnait, et au dehors une décharge d’artillerie.

Tu me dispenseras d’entrer dans les détails pour les mets et les différentes

  1. Échasseriaux (Charente-Inférieure), Coullion Mamert (Maine-et-Loire), Le Borgne de Boigne (Saint-Domingue).

    Dans la séance du 28 janvier 1790, l’Assemblée nationale avait, malgré de vives oppositions, décrété la suppression, à partir du 1er  janvier, même mois, de toutes les dépenses publiques relatives aux haras. (Moniteur, 1er  février. — Réimpression, t. iii, 257).

  2. Le 27 brumaire précédent (17 novembre 1797) Bonaparte, général en chef de l’armée d’Italie avait chargé Joubert, un des héros de la campagne, de porter à Paris au Directoire exécutif le drapeau triomphateur et lui-même était rentré à Paris, le 15 frimaire (5 décembre). (Moniteur 13 et 17 frimaire. — Réimpression, t. XXIX, p. 77 et 83).

    On sait que, nommé à son tour général en chef de l’armée d’Italie, Joubert fut tué à la bataille de Novi, le 28 thermidor an VII (15 août 1799). Depuis quelque temps déjà, a-t-on assuré, Bonaparte l’avait associé à ses projets de coup d’État. (Sur Joubert, v. ses notices et Tables du Moniteur).