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à l’inattention[1]. Ne devons-nous pas, du reste, nous montrer d’autant moins exigeant pour lui, — un paysan, en somme, — que fréquemment nos recherches sur l’époque révolutionnaire nous ont mis en présence d’écrits autrement incorrects, émanant de personnalités plus importantes, voire même d’instituteurs de langue française, nommés par les représentants du peuple en mission.


À Paris, le 25 frimaire an IIIe de la République une et indivisible.
(15 décembre 1794.)


Chère épouse,

« Je me rappelle que depuis le 10 thermidor, c’est-à-dire depuis qu’il est permis de penser et d’écrire, j’ai laissé échaper dans une des lettres que je t’ai adressées ces mots : « Tu ne pourois te faire une idée des maux que j’ai soufferts pendant ma détention. » Tu n’as cessé, depuis ce tems, de m’en demander les détails. Cent fois je l’ai essayé sans oser le continuer. Je me détermine enfin à te retracer quelques faits, dont moi et mes collègues

  1. Le journal de la captivité du conventionnel, conservé dans la famille, appartient aujourd’hui à un de ses petits-fils, M. François-Marie Quéinnec. Celui-ci, né le 23 février 1831, habite Loc-Menven, en Guirlan, dont il a été longtemps maire, en même temps que conseiller d’arrondissement du canton de Taulé.

    Ce document nous a été communiqué, en 1909 par M. Jean-Louis Quéinnec, un de ses neveux, conseiller général du canton de St-Thégonnec, demeurant à Bailléguen, en cette commune. Toutefois, depuis, le manuscrit a passé par les mains de M. Jonn Kernels, qui l’a fait imprimer au Bulletin de la Société Académique de Brest (tome XXXV, 1910-1911}, avec quelques courts renseignements biographiques sur l’ancien représentant, et une note, où il adresse à tous ses remercîment à M. Bernard Quéinnec, propriétaire et président du Comice agricole de Saint-Thégonnec, pour lui avoir procuré le journal par les soins des feues Mlles  Quéinnec, récemment décédées à Guielan, l’une petite-fille, et l’autre parente plus éloignée du conventionnel ».

    Ce journal n’a donc plus le mérite de l’inédit. Nous croyons cependant devoir le rééditer parce qu’il nous a paru que la copie de M. Kernéis est loin d’être exacte. D’abord, il a cru devoir redresser souvent l’orthographe vicieuse de cette pièce. En outre, peu familiarisé avec les documents de cette époque, il s’est trouvé, on doit le reconnaître aussi, dans l’obligation de déchiffrer un document peu ordinaire. Croirait-on que le journal, dont les caractères microscopiques ne peuvent guère se lire qu’à la loupe, tient en entier, sur deux feuillets petit in-4o ? Quand on saura enfin que des passages sont actuellement illisibles, parce que le papier est sali, usé, ou même déchiré en quelques endroits, on ne sera pas surpris que M. Kernéis, (c’est du moins notre opinion), ait transcrit certaines phrases de façon à en modifier complètement le sens. Nous nous proposons, du reste, de relever, en notes, plusieurs de ses erreurs de lecture.