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Les nouveaux habillements du Corps législatif furent rapidement confectionnés, d’après les indications de ce décret, et portés désormais par les députés à toutes les séances. Nous croyons qu’il dût en coûter au bon et simple Quéinnec de troquer son costume noir et sévère du Léon contre un pareil déguisement d’opéra-comique[1].

  1. Les tableaux et gravures de l’époque en fournissent des preuves indiscutables. Certes le costume est théâtral. Pourquoi faut-il donc que certains artistes et auteurs modernes s’ingénient encore à le compliquer, en affublant les membres du Corps législatif de l’an IV, des uniformes créés par l’imagination de David pour les membres de la Convention.

    Tout récemment encore, M. Albert Mallet, professeur agrégé d’histoire au Lycée Louis-le-Grand a fait cette confusion dans son Histoire de France et notions sommaires d’histoire générale de 1789 à 1875 (Paris, Hachette, 1909 p. 113).

    Il écrit au-dessous d’une aquarelle de David, qu’il intitule : Un député aux Cinq-Cents :

    « La simplicité « Spartiate » avait été de mode sous la Convention : les députés n’avaient pas de costume spécial. Sous le Directoire on eut le goût du pompeux, fût-il ridicule. Directeurs, députés, juges, etc., eurent des uniformes. Ceux des Anciens et des Cinq-Cents furent dessinés par David, qui prétendit s’inspirer de l’antiquité. Les députés portèrent des toges et des tuniques, à la romaine, accompagnées de toques, pareilles à des casques polonais. Toque rouge à turban bleu, ganses tricolores et bouquet d’épis d’or. Toge bleue, bordée en bas d’une bande rouge entre filets blancs. Tunique marron, serrée par une écharpe tricolore. Culotte collante gris bleu ; bottes noires. Inscriptions en lettres d’or sur fond rouge. Les députés portaient ce costume à toutes les séances ».

    C’est inexact, car la composition de David est de 1793 ou 1794. (V. Le peintre David suite d’eaux fortes d’après ses œuvres, gravées par J. L. J. Barid, son petit-fils, Paris, Havard, in-f°, 1882. — La Révolution française album Davor), p. 180, 464, 474, etc.)

    On peut toutefois se demander si les costumes imaginés par David (Représentant à la Convention, Représentant aux armées, etc.), ont été jamais portés tels qu’il les a dessinés.

    Dans son rapport du 29 fructidor (15 sept.), que nous avons cité, Grégoire dit à propos de la tenue des conventionnels :

    « …On se rappelle l’ouverture imposante des États généraux et surtout l’émotion des citoyens lorsque la différence des costumes leur indiqua leurs véritables représentants, les députés du tiers état. La suppression des ordres, qui supposait une différence dans l’existence civile et politique, entraîna la suppression des costumes ; mais l’Assemblée Constituante eut le tort de n’en pas substituer un qui fût commun à ses membres. Dès lors s’affaiblit la dignité de ses séances. Le mal empira jusqu’à l’époque où les tyrans qui opprimaient la Convention nationale mirent presque la propreté, la décence, au rang des crimes contre-révolutionnaires, et se firent un mérite d’afficher jusque dans leur costume