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un peu, la Convention, plus intéressée que toute autre à l’affaire, pensa qu’il serait bon de s’occuper spécialement du costume de ses membres[1]. Une bonne partie de ses dernières séances fut consacrée cette grave question :


Convention nationale (Séance du 28 vendémiaire an IV. — 20 octobre 1795).

Grégoire : Vous avez ordonné hier au Comité d’instruction publique, de vous représenter le décret relatif au costume des membres du Corps législatif. Comme il y a trop peu de temps d’ici au jour où la session ouvrira pour faire les habits, il serait peut-être bon de laisser au Corps législatif le soin de se costumer comme il le voudrait.

* * * Ce n’est pas possible, car le décret du 5 fructidor (22 août 1795, qui a été sanctionné par le peuple, porte que la Convention fixera le costume.

Defermon (Ille-et-Vilaine) : Il ne faut point que le costume soit embarrassant ; il faut que les membres du Corps législatif ne soient point obligés d’en changer pour aller à leurs affaires. La robe que propose le Comité d’instruction publique, exagérait une tenue que l’économie, qui doit être une vertu des républicains, que l’économie sévère que les circonstances nous obligent de garder, ne nous permet pas d’avoir. Je demanderais, que l’on portât seulement un habit de drap bleu, avec collet et parements brodés.

Barailon (Creuse) : Il ne faut pas que le costume ait rien d’embarrassant : mais il faut qu’il ait de la dignité et qu’il puisse être porté même hors de la salle des séances. Il faut conserver une sorte d’ordre, une sorte de système dans l’établissement des divers costumes, car il doit y en avoir au moins soixante différents. On pourrait avoir une robe qu’on mettrait, et qu’on ôterait à volonté.

Boissier (du Finistère) : Les fonctionnaires publics doivent être vêtus d’une façon convenable au climat sous lequel ils vivent, d’une manière convenable à l’esprit et aux habitudes de la nation dont ils font partie.

Les Français ne doivent pas porter un habit grec, romain ou persan ; et il est possible, en conservant la forme ordinaire du nôtre, de trouver des signes qui distinguent les divers fonctionnaires. On pourrait donner au Corps législatif et au Pouvoir exécutif la couleur à laquelle on a attache le plus d’idée de la suprême puissance, la couleur pourpre, par exemple, ou le bleu foncé. On pourrait choisir, pour les administrateurs, le bleu

  1. Grégoire ne s’en cacha pas dans un curieux rapport qu’il lut, au nom du Comité d’instruction publique, à la séance de la Convention du 29 fructidor an iii (16 sept. 1795} et dont l’assemblée ordonna l’impression : « Le langage des signes, y disait-il, a une éloquence qui lui est propre : les costumes distinctifs font partie de cet idiôme. Ils réveillent des idées et des sentiments analogues à leur objet, surtout lorsqu’ils s’emparent de l’imagination par leur éclat. L’homme le plus dégagé de tout ce qui est matériel est accessible au prestige des décorations et à la magie de tous les arts d’imitation, etc. (V. Moniteur, 3e  jour complém. de l’an iiiRéimpression, XXV, 769. — Buchez et Roux : Hist. parl. de la Révolution Fse, t. XXXVI, p. 517-522).