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HISTOIRE URBAINE 424

à fait insignifiant», et le bourg est «l’ensemble des maisons groupées sur un fief auprès d'un château». Sauf cinq villes d’origine romaine et cinq autres d'origine religieuse datant du vie siècle, toutes les villes bretonnes, grandes et petites, naissent ou deviennent telles postérieurement au xe siècle. Réserve faite de Saint-Malo et peut-être de Pornic, auprès d’un château fort ou, très rarement, d'une abbaye chef-lieu d’une seigneurie, des hommes d'armes, des réfugiés, des marchands viennent bâtir des maisons ; le seigneur y joint une église dont il confie le service à des Bénédictins appelés de France ;ceux-cien outre reçoivent, pour eux directement, comme pour leurs futurs vassaux, qui n'obtiennent jamais de concessions personnelles, des privilèges divers, en particulier économiques ; la transformation possible du sanctuaire-prieuré primitif en église paroissiale réservée à un curé, achève de constituer le lien et d'assurer l'autonomie du groupement. Les seigneurs, qui furent les initia- teurs, les religieux, les marchands, concourent donc à la formation de nou- velles villes ; en d'autres provinces, si le marché a appelé la forteresse, en Bretagne, c'est la forteresse qui a fait naître le marché. Quelqueois les abbés féodaux remplacent les seigneurs laïcs comme fondateurs. Dans l'ensemble, la féodalité, quoique rigoureuse, est donc fondatrice et créatrice, mais la dépendance de la classe servile explique l'absence de villes franches ou sau- vetés.

Cette formation générale s'applique d'abord aux villes de l'intérieur qui, pour la plupart, ne prirent qu’un développement assez limité, mais elle vaut aussi pour les villes de la côte dites « fluvio-maritimes», situées au début de l'estuaire des fleuves côtiers, là où s’arrête la marée et où les routes parallèles aux côtes franchissent la rivière : ces localités, portes commerciales et surtout lieux de passage, résistèrent mieux que les précédentes à la décadence. Enfin, au bord de la mer existent deux villes, Pornic, de formation inconnue, et Saint-Malo qui, par sa situation géographique et son rôle comme lieu d'asile, attira les étrangers. Ces deux dernières cités servirent en quelque sorte de modèle à toutes les villes maritimes proprement dites dont, depuis le xrire siècle, le développement de la pêche et du cabotage amena la création à l'em- ‘bouchure des cours d’eau, au détriment des localités plus anciennes situées au fond des estuaires.

Cet article original et intéressant, où précisément la géographie s'unit à Vhistoire, mérite d'autant plus d’être signalé qu'il attire l'attention sur une province restée jusqu'ici un peu en dehors des recherches urbaines. L'auteur, qui a su très bien distinguer les différentes catégories de villes, dans l'en- semble n’a pu considérer évidemment que des centres secondaires. En Bre- tagne cependant, on peut constater que les mêmes phénomènes généraux qu'ailleurs, et au même moment, se retrouvent et s’associent. La politique et l'économie s'unissent et agissent, mais la petitesse des agglomérations fait que c'est l'élément politique, représenté par le seigneur, qui joue un rôle actif ; l'élément économique, les habitants, gardent un rôle passif, qu’accuse encore leur absence juridique de liberté. Mais, à cet égard, si on examine partout le même ordre de localités, la Bretagne ne semble présenter aucun caractère particulier par rapport à d’autres régions. Il n’en est pas autrement, quoi qu'en pense l'auteur, au sujet de l'élément militaire, de l'action de la forteresse. Partout le marché s’est formé autour et sous la protection de la