Page:Annales d’histoire économique et sociale - Tome 1 - 1929.djvu/123

Cette page n’a pas encore été corrigée

HISTOIRE URBAINE 117

L'étude achevée des deux séries de villes permettra, dans l'avenir, de préciser les détails et de « doser» les comparaisons.

Dans la région provençale encore, entre Marseille et Arles, se trouve la petite ville de Salon, à l'histoire médiévale de laquelle M. R. Baux a consacré un travail!. Placée dans une situation économique, rurale et commerciale «privilégiée», dans une région très fertile, « pivot» de la contrée, née sur un rocher dominant la Crau, elle doit son origine à une exploitation rurale mi en valeur par les archevêques d'Arles qu’une donation des rois de Provence rendit seigneurs temporels de ce domaine. Les descendants des quelqu habitants que, dès l'époque romaine, la culture avait pu attirer en cet endroit, au moment de l'anarchie médiévale, à la fin du 1xe siècle, durent se mettre sous la protection de ce puissant propriétaire féodal qu'était l'archevéque.

elui-ci fonda sur le rocher de Salon une sorte de château fort, un eastrum. Située sur la route très fréquentée de Marseille à Avignon, la place devint une espèce de relai ; au pied de la forteresse, s'établit un marché, une ville, Salon était donc une seigneurie ecclésiastique. Les archevéques, qui ÿ avaient une résidence, la favorisèrent beaucoup matériellement par de nombreuses mesures économiques, comprenant qu'ils agissaient dans leur propre intérêt. Mais, « avec un soin jaloux», is tinrent absolument à conserver les droits sou verains qu'ils y possédaient sans aucune restriction, en particulier la justice.

u xine siècle, en effet, les habitants leur sont entièrement soumis et ne jouissent d'aucune autonomie directe. Les prélats convoquent, s'ils le jugent nécessaire, les chefs de famille pour former le Parlementum et le président sans voix délibéralive : cette assemblée permet à leurs sujets d'émettre leurs vœux et de discuter leurs intérêts avec eux. Les membres délèguent leurs pouvoirs à des procureurs temporaires dits syndics, qui constituent une assemblée restreinte, le Conseil, s'occupant en fait des affaires courantes sans posséder de pouvoirs de droit. « Ce n'était pas là une organisation, ce n'était qu'une participation à la vie municipale», el même, en 1354, après de longs débats avec l'archevêque, les habitants se virent obligés de renoncer à « Loute ombre de communauté 2,

Mais, à la suite du désastre causé par les Grandes Compagnies, de l’anar- chie qui en résulta, grâce aux efforts tenaces de la ville qui renomma d’elle- même ses syndics, grâce aussi à l'intervention arbitrale, bienveillante même, du pape entre elle et l'archevêque, de 1386 à 140%, les habitants, en un demi- siècle d'efforts heureux, arrivèrent à se faire reconnaître une organisation communale : elle comprenait des syndics et des conseils nommés par le Parle- ment. La vie municipale continua d’ailleurs de marcher de compte à demi avec l'autorité ecclésiastique. Les habitants furent récompensés de leur esprit de suite ; seuls en face des archevêques, ils réussirent finalement à obtenir l'autonomie administrative, à l'exclusion d’ailleurs de privilèges politiques : ils formaient ce que l'on peut appeler une «communauté syndicale ss, Dans l'application, ce qui frappe avant Lout chez leurs dirigeants, « c’est leur bon sens pratique et la sage mesure qu'ils montrent dans l’organisation et l'admi-
















1. La vitie de Salon au moyen âge. La vie économique. Le régime seigneurial. Le régime municipal, Aix-en-Provence, Impr. universitaire de Provence, 1924, in-8, 283 p. (Publicae Hons de la Société d'Etudes provengales, V9.

2. p.497.

F6.