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116 ANNALES D'HISTOIRE ÉCONOMIQUE ET SOCIALE

Ce ne sont pas là de vaines chicanes. Les documents ne sont pas toujours d’une étude aisée : facilitons la besogne du lecteur.

L'étude du travail de M. Bourrilly doit être complétée par celle du compte rendu approfondi et original que M. LaBane lui a consacré, en s'arrêtant au moment où s'achève l'acquisition de la vicomté par la ville (1230). M. Labande s'attache «aux origines, aux premières actions, aux conditions du développement de la commune, aux acquisitions qui, en la substituant peu à pou aux vicomtes, lui permirent de devenir graduellement une véritable sei- gneurie exerçant tous les droits de juridiction »*. En reprenant, en parti- culier, certains actes du xur siècle, il a pu montrer que, dès 1136, le « com- mune Massilie», s'il n'était pas encore la commune organisée, « jurée», autonome, était déjà l'universitas, la communauté, l'ensemble de tous les habitants, tant milites que burgenses ou mercatores, agissant comme un état, ayant au besoin des délégués, possédant son domaine, son budget, mais restée encore sous la direction des seigneurs locaux, vicomtes ct évêques. Puis, après la mention des consuls de 1178, apparaît, on s'en souvient, la corporation du Saint-Esprit : à ses débuts, simple répétition de l'ancienne universitas, elle ne tarde pas à organiser et à diriger la commune dont elle étend, par des acquisitions successives, les possessions extérieures comme le domaine local. Ge passage graduel de Vinorganique à l'organique, de l'indé- terminé au précis, de l'incomplet au complet, est en somme, absolument normal, et on no peut que louer M. Labande du soin avec lequel il a étudié et de la pénétration avec laquelle il a interprété les actes, trop rares, qui nous demeurent de cette époque

Si on cherche maintenant à comparer dans leurs lignes générales une grande commune de la Méditerranée, telle que Marseille, aux municipalités importantes de la Flandre, il semble que certains rapprochements soient possibles. De part et d'autre, l'origine du groupe urbain est économique ; son apparition remonte au xs siècle au moins; sa population comprend en particu- lier des mereatores. La commune semble se former au xu° siècle, son organi- sation apparaît vers la fin de cette période ; la communauté renferme au moins toute la population de nature urbaine. Le centre habité manque d'unité juridique et la commune cherche à établir celle-ci en « arrondissant » son domaine par des acquisitions : l'achat de la vicomté féodale s’effectue dans le Midi comme celui de la châtellenie féodale dans le Nord ; l'opération est rendue possible, de part et d'autre, par les besoins d'argent du vendeur. Dans l'ensemble, la formation communale est plutôt pacifique, quoique non exempte de difficultés. La constitution est oligarchique. Les tentatives d'émancipation exagérées de la commune vis-à-vis des princes territoriaux aboutissent finalement, non pas à en faire une ville libre, mais à la faire retomber, au contraire, sous leur domination. D'autres rapprochements seraient sans doute encore possibles, sans nier qu'il y ait des différences.






4. Journat des Savants, 1026-1927.

2. Ibid, 1927, D. 75.

3. À vrai dire, une différence paraît exister à cet égard entre les communes du Nord et ccile de Marseille : les premières ne comportent que la population vivant sous le drolt urbain, la seconde renferme en plus des chevalers (BourmuLsr, p. 24-29, 54, 76. LABANDE 4926, p. 404 ; 4927, p. 21, 74). La question aurait peut-être besoin d'être encore précisée.