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l’école et la nation en france

primer, en ce qui touche l’Église, tout ou partie des trois libertés ci-dessus énumérées.

On entreprendrait de surveiller la parole du prêtre en chaire, les propos du confesseur, les manifestations parfois retentissantes où, sous tous les prétextes, l’Église excelle à dérouler ses gros bataillons, ne fût-ce que pour les tenir en haleine ou pour impressionner l’imagination des spectateurs.

On entreprendrait de limiter, de réglementer les innombrables associations par lesquelles l’Église ne désespère pas de remplacer avec succès ses milices congréganistes, à commencer par les associations dites de pères de famille, simple paravent du clergé.

On entreprendrait, enfin, ou d’abolir ou de réduire à une existence précaire tout cet enseignement privé dont la prospérité fait l’orgueil du monde catholique : en fait et en droit, l’État seul enseignerait.

N’hésitons pas à le dire : ce retour à la « manière forte », à la politique césarienne, à l’emploi des grands moyens de gouvernement serait tout le contraire d’un progrès. En s’y résignant, la République ferait un aveu d’impuissance, elle se renierait elle-même. Ce serait bien autre chose que l’abandon d’une tactique ou d’une ligne de conduite politique. En condamnant ses principes mêmes, elle frapperait d’un irrémédiable discrédit ses lois, ses œuvres, ses institutions.

Aussi, ne croyons pas qu’il y ait lieu de s’arrêter à cette hypothèse. On a bien pu l’envisager dans des moments d’impatience et sous l’empire d’une colère parfois trop justifiée. Mais le pays, qui est le grand juge, n’est pas décidé à se jeter dans une telle aventure. Et, il imposera aux gouvernants d’aujourd’hui ou de demain la fidélité pure et simple à l’autre méthode.

L’autre méthode, d’allure moins belliqueuse et surtout de caractère moins simpliste, c’est celle qui a constamment prévalu en France depuis trente ans. Nous sommes sur le seul bon terrain, il faut nous y tenir, sans nous en laisser détourner par les feintes de l’adversaire qui a intérêt à nous le faire quitter.

Il ne faut abandonner ni la laïcité, ni la liberté. Ce sont les