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HOLKAR. À mort, le traître.

DGENGUIZ-KAN. Non… la mort est un supplice trop doux… Tschongaï… tu vivras encore… mais pour souffrir… mais pour voir le massacre des tiens, la destruction de ta capitale, l’anéantissement de ton empire… Soldats, enchaînez cet esclave… et maintenant, à Péking.

TOUS. À Péking.


FIN DU DEUXIÈME ACTE.




ACTE TROISIÈME.

Premier Tableau.
L’intérieur de la grande pagode de Peking. Le peuple, à genoux, prie. Le grand-prêtre brûle des parfums aux pieds de l’idole, et l’impératrice est prosternée au milieu du temple.

Scène PREMIÈRE.

L’IMPERATRICE, LE GRAND-PRÊTRE,
Peuple.

LE GRAND-PRÊTRE. Dieu du céleste empire, tes enfans combattent l’étranger… ne souffre pas que le pied du barbare souille les marches de ton temple… ne souffre pas qu’il égorge nos pères, déshonore nos femmes, et jette à nos enfans les chaines de l’esclavage ! Dieu du céleste empire laisse tomber un de tes regards sur le champ de bataille où le sang coule, et donne la victoire à Tschongaï.

ELMAÏ. Mon Dieu ! reprends-moi cette puissance que je n’ambitionnai jamais… cette couronne que ta bonté plaça sur mon front… reprends-moi tout cela, mon Dieu ! mais rends-moi mon Idamé, rends-moi mon enfant !


Scène II.

Les Mêmes, ONLO.

ONLO, accourant. L’impératrice ! l’impératrice !

ELMAÏ. Qui m’appelle ?

ONLO. Ah ! madame, ne pleurez plus… ne doutez pas de nos dieux ! Votre fille…

ELMAÏ. Eh bien ?

ONLO. Elle est sauvée !

ELMAÏ. Qu’entends-je ?

ONLO. Ramenée par cet étranger qui l’était venu chercher au nom de Dgenguiz-Kan, la princesse Idamé est peut-être, au moment où je parle, au seuil de la pagode sainte.

ELMAÏ. Ma fille !… elle existe ! elle est là !… Tu l’as vue ?… Ô mon Dieu ! mon Dieu ! ne me laissez pas mourir de joie !

Au bruit qui se fait entendre, le peuple court du côté droit de la pagode, et bientôt on voit paraître le palanquin d’Idamé porté par les esclaves et suivi de Marco.

Scène III.

Les Mêmes, MARCO, IDAMÉ,
Esclaves.

ELMAÏ. Ma fille ! mon Idamé ! D’où vient donc qu’elle n’est pas déjà dans mes bras ? d’où vient donc qu’elle est sourde à la voix de sa mère ? Quelle affreuse pensée ! Si Tschongaï est un traître, Dgenguiz-Kan est un barbare !… Il se sera vengé… peut-être ! vengé sur mon enfant ! Ah !… (Elle court au palanquin ; elle aperçoit Idamé, pâle et sans mouvement.) Ah ! elle est morte !.…

TOUS. Morte !…

ELMAÏ. Morte ! oui !… Ah ! je reconnais Dgenguiz !… Et toi, misérable, tu n’as pas frémi de te charger d’un pareil message ?

MARCO. Je savais combien était périlleuse la mission qui m’était confiée, et pourtant je ne l’aurais abandonnée à aucun autre… Madame, je comprends et votre douleur et votre haine !… pourtant j’ose espérer qu’avant de me livrer au ressentiment de votre peuple, vous m’accorderez un moment d’entretien.

ELMAÏ. À toi !

MARCO. Je vous le demande au nom de votre fille.

ELMAÏ. De ma fille ! Tu oses invoquer le souvenir de ta victime ?

ONLO. Ne différez pas le châtiment de cet infâme !

LE PEUPLE. Oui… à mort ! à mort !

ELMAÏ. Non, pas ici.

MARCO. Madame, si vous refusez de m’entendre, vous vous le reprocherez cruellement un jour, et vous offrirez à Dieu vos larmes en expiation de mon sang répandu par vos ordres.

ELMAÏ. Je veux bien t’écouter ; mais n’espère pas obtenir de moi ni grâce ni merci ! car le cadavre de ma fille restera là entre nous deux… et ce cadavre demande vengeance… (Au peuple.) Retirez-vous.