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nobles mandarins, vient te dicter ce qu’il appelle les conditions de son maître.

MARCO, à part. Oh ! Idamé est perdue !

Dgenguiz-Kan, après avoir regardé Idamé en pleurs, se replace froidement sur son trône.

DGENGUIZ-KAN. Fais venir les envoyés de Tschongaï.

MARCO, à part. Quel est son projet ?


Scène IV.

Les Mêmes, HIAOTSONG, Mandarins.

DGENGUIZ-KAN. Approche et parle.

HIAOTSONG. Par ma voix le puissant maître du céleste empire déclare rompue la trêve que la force lui avait imposée… Usant à son tour de la fortune, qui se déclare enfin pour lui, Tschongaï pourrait ne t’accorder ni grâce ni merci ; il pourrait t’écraser toi et ton armée sur ce sol que tu as eu l’orgueilleux espoir de conquérir. Mais, clément et généreux, l’empereur consent à t’accorder passage, à assurer ta retraite jusqu’au-delà de la grande muraille, si avant tout tu lui renvoies saine et sauve la princesse Idamé.

DGENGUIZ-KAN. Et si je refuse ce que m’offre ton généreux et clément empereur ?

HIAOTSONG. Alors n’espère plus de quartier, la Chine sera le tombeau de Dgenguiz-Kan et de son armée. Il ne restera pas un seul de tes guerriers pour aller effrayer les Mongols du récit de ta défaite.

DGENGUIZ-KAN. C’est bien ! Soldats, je crois lire sur vos visages la réponse que je dois faire à ces insolentes menaces ; vous verrez tout-à-l’heure si je vous ai bien devinés. Hiaotsong, si, connaissant le message qu’on t’avait confié, je t’ai permis d’arriver vivant jusqu’à moi, c’est que j’ai voulu te prouver, à toi et aux tiens, que j’avais religieusement tenu ma parole. J’avais juré une trêve, tu as vu mes soldats désarmés ; j’avais demandé à Tschongaï sa fille pour en faire ma compagne, tu l’as vue assise à mes côtés, tu l’as vue parée de ma couronne. J’ai voulu t’apprendre comment on respectait un traité, tu m’apprends, toi, Comment on y manque. Humble et lâche après sa défaite, Tschongaï a tendu vers moi ses mains suppliantes ; soit pitié, soit mépris je n’ai point écrasé mon ennemi ; et Tschongaï aujourd’hui m’offre insolemment de choisir entre la mort et la honte ! L’insensé ! il a donc oublié qu’il me restait une autre voie de salut, la victoire. (Acclamations des Mongols.) Ah ! je vous avais donc bien compris, mes braves… Reprenez vos armes, et ne désespérez pas de la fortune ; la muraille d’hommes qui vous entoure ne sera pas plus insurmontable que la muraille de pierres que vous avez renversée. Mais il faut encore une autre réponse à Tschongaï ; il me redemande sa fille ; Hiaotsong, tu vas lui porter la tête d’Idamé.

Il arrache violemment la couronne de la tête d’Idamé. Mouvement.

MARCO. Arrête !

HIAOTSONG. Oseras-tu bien verser le sang impérial ? As-tu pensé qu’aucun de nous se chargerait d’un aussi horrible message ?

DGENGUIZ-KAN. En effet ! esclave dévoué, tu ne dois pas survivre à la fille de ton maître. Tu l’avais précédée à mon camp, tu la précéderas sous la tente de son père ; tu m’étais venu annoncer son arrivée, tu iras annoncer son retour… Soldats, je vous livre ces envoyés d’un prince sans foi et sans loyauté ; qu’ils meurent, et que leurs têtes lancées dans les rangs ennemis apprennent à Tschongaï qu’à la guerre du serpent nous savons répondre par la guerre du tigre.

Aussitôt les Mongols s’élancent avec des hurlemens féroces sur Hiaotsong et ses compagnons, déchirent leurs robes et les entrainent en les frappant de leurs armes. Idamé a détourné la tête avec horreur.

Scène V.

Les Mêmes, hors HIAOTSONG.

MARCO. Seigneur, seigneur, tu violes le droit des gens.

DGENGUIZ-KAN, sans l’écouter. Et maintenant, fille de Tschongaï, instrument volontaire d’une odieuse perfidie, préparez-vous à mourir.

MARCO. Oh !

DGENGUIZ-KAN. Soldats, à vous cette femme.

Quelques guerriers mongols s’avancent et vont s’emparer d’idamé, Marco veut se précipiter entre elle et les soldats, d’un geste elle arrête Marco et les Mongols.

IDAMÉ. Dgenguiz-Kan, l’arrêt que tu viens de prononcer, quelque cruel qu’il soit est juste. Mais avant qu’Idamé tombe sous les coups de tes soldats, sache bien qu’elle ignorait le piége qu’on tendait sous tes pas ; sache bien qu’Idamé serait morte avant de se faire complice d’une trahison… Et maintenant, que tes soldats n’hésitent pas à me frapper, ce n’est pas sur leurs têtes que mon sang devra retomber un jour.

Elle avance vers les soldats, qui, surpris de tant de courage, reculent et laissent tomber leurs armes.

DGENGUIZ-KAN. Eh quoi ! la fille de