Diable ! je n’avais pas songé à ça !
Oh ! je ne sortirai pas d’ici sans savoir…
Attendez-moi, Wilhelm, laissez partir les équipages ; nous rejoindrons nos amis dans la forêt, avec notre calèche.
Qui vient là ? Chambord, quel est cet homme ?
Ah ! mon Dieu ! il va le reconnaître ! (À Pascal.) Ça… c’est un particulier qui veut me poser un bail sur les quatre veines, à l’instar de quatre-vingt-quinze sangsues… Allons-nous-en.
Attends ! je me souviens… c’est…
C’est un vieux singe… allons-nous-en.
Ah ! ah ! vous voilà, paysan ! (Il cherche des papiers sur un guéridon.) Après le Champagne, les affaires. Nous allons causer un peu du bail de notre ferme.
Il a dit notre ferme ; mais la ferme que tu exploites appartient à Wilhelmine.
Sans doute.
C’est lui ! alors…
Que me veut ce soldat ?
Qu’est-ce qui te prend donc, Pascal ?
Me reconnaissez-vous, monsieur ?
Vous ?… pas le moins du monde !
Regardez-moi bien.
Ah ! attendez donc !… n’êtes-vous pas le soldat que j’ai vu ici, il y a… ?
Il y a dix-huit ans… c’est cela… Vous vous êtes donc marié, monsieur ?
Pourquoi diable lui demande-t-il ça ?
Oui, soldat, oui, je me suis marié à peu près à la même époque.
C’est cela, après mon départ… (Haut.) Et vous l’aimez bien, votre femme ?… elle vous aime aussi, sans doute ?
Je me flatte d’avoir seul fait battre son cœur.
Elle vous l’a dit ?
Très-souvent !
Eh bien, elle vous a trompé !
Hein ?
Qu’est-ce qu’il dit ?
Ma femme !…
En a aimé un autre…
Un autre que moi ?…
Miséricorde !… j’y suis à présent !… cacophonie des cacophonies !
Elle ne vous a donc rien avoué votre femme ?
Qu’est-ce que j’ai fait là !… (Haut.) En v’là assez, Pascal !
Mais qu’avait-elle donc à m’avouer, monsieur ?
Rien du tout !
Elle avait à vous dire qu’elle avait donné son cœur à un soldat qui lui avait consacré sa vie toute entière, l’insensé !… et pour mieux le tromper, elle lui avait envoyé un gage de cet amour menteur !
Qu’est-ce que j’apprends-là ?
Ne faites pas attention, monsieur le baron. Pascal, la cariole est prête… en route !
Pas encore ; je veux savoir au juste…
Scène VII.
Laisse-moi donc rassurer cet homme… laisse-moi lui dire que je ne verrai plus celle qui m’a trompé ; laisse-moi lui dire que la haine et le mépris ont remplacé l’amour que j’avais gardé dans mon cœur… (Wilhelm entre par la droite.[1]) Oui, il n’y a plus là que de la haine et du mépris pour Wilhelmine !
Wilhelmine !
Oh ! tais-toi, Pascal, tais-toi !
Wilhelmine… mais ma femme s’appelle Gertrude.
Vous venez de prononcer le nom de Wilhelmine, monsieur ?
- ↑ Chambord, Pascal, Wiilhem, Frédéric