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ROCAMBOLE.

Ah ! oui, oui ! je commence à comprendre : livrer Rocambole à la justice serait risquer de vous compromettre ; servir le comte de Chamery est, en effet, ce que vous avez de mieux à faire, et vous venez m’apprendre de quoi prix je devrai payer vos services.

LE DOCTEUR.

Précisément… (Lui tendant un papier.) Signe cela de ton nom… du vrai, et je te liens quitte du passé.

ROCAMBOLE, qui a lu.

Peste ! pour vous seul les millions de Chamery ?…

LE DOCTEUR.

Je le laisse toute la fortune de Sallendrera ; je suis d’une générosité qui m’étonne moi-même.

ROCAMBOLE.

Vous aviez raison tout à l’heure : quand j’ai peur, je ne suis qu’un sot. Il ne fallait pas me laisser le temps de réfléchir et de me rassurer. À mon tour, je vous dis : causons. Je vous dois quelque chose, je le reconnais…

LE DOCTEUR.

C’est bien de ta part !…

ROCAMBOLE.

Mais signer cela, jamais !

LE DOCTEUR.

Tu signeras tout à l’heure !

ROCAMBOLE.

Je n’ai plus besoin de vous maintenant, et on ne paye pas si cher des services passés.

LE DOCTEUR.

Oh ! je sais que tu as une manière à toi de l’acquitter, mon petit Rocambole ! nous n’avons pas encore changé de rôle. Je suis toujours ton maître et je te le prouverai ; tu es à ma merci comme lorsque je le lundis haletant sous mon genou. Je l’ai dit que j’avais fait une rencontre à l’hospice ; sais-tu qui le hasard, ou plutôt ta bonne étoile, avait placé là sous mon regard, sous ma main ?… Armand, comte de Chamery.

ROCAMBOLE.

Armand !

LE DOCTEUR.

Armand, tiré de l’eau comme moi et dans un état désespéré, avait été, comme moi, transporté à l’hospice…