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SA VIE — SES ŒUVRES

Condé a été l’un des principaux acteurs du complot. Sa participation est soupçonnée, et il ne lui reste qu’à s’éloigner d’Amboise, s’il en est temps encore, car son titre de prince du sang ne serait point pour lui une sauvegarde efficace. Le prince ose pourtant se montrer à la Cour. Le téméraire ! il y est attiré par un amour qui est le ressort du drame qui va s’accomplir. La jeune femme du vieux comte de Brisson a été arrêtée par une escouade de conspirateurs huguenots. Elle était en butte à leurs outrages, quand elle a été protégée par Condé dont elle ignore le nom et le rang. Sa beauté a produit un tel effet sur le prince, que celui-ci, beaucoup moins pour servir les intérêts du parti huguenot que pour revoir la dame de ses pensées, n’hésite point à retourner à la Cour, dût-il être à son tour livré au bourreau. Les Guises ne le perdent point de vue, et François II le ferait arrêter et condamner, si, averti à temps, il n’avait la précaution de s’éloigner. Il ne le fera point pourtant sans avoir revu celle pour laquelle il a bravé tant de périls. Il reste à Amboise, dans la ville, pour donner un rendez-vous mystérieux à la comtesse de Brisson, à laquelle il fait savoir qu’il y va pour lui de vie ou de mort. La comtesse, d’après l’instigation de Catherine de Médicis qui veut ménager Condé, et aussi poussée par un mouvement de son cœur, se rend à l’entrevue sollicitée et apporte au prince de la part de la reine-mère des assurances de protection. À la vue de la comtesse, Condé ne songe qu’à son amour. Il se répand en protestations passionnées que Mme de Brisson, sans oublier ses devoirs, ne décourage point tout-à-fait. Soudain on frappe à la porte, c’est le vieux comte de Brisson qui a épié les démarches de sa femme et tente de la surprendre. Condé la fait esquiver à grand peine et reçoit l’assaillant l’épée à la main. Les choses finiraient mal pour lui, si le huguenot Poltrot de Méré n’accourait