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SA VIE — SES ŒUVRES

l’Amérique, les merveilles de l’électricité et de ses applications.

Les révolutions de la science et des états se sont succédées, l’Homme a accompli de grands travaux, mais il est comme blasé de ses œuvres. Une sorte de fatigue s’est emparée de lui, sa raison l’épouvante, le doute l’assaille. Va-t-il être témoin ou victime d’une nouvelle révolution cosmique ? Que va-t-il devenir ? Quelles seront ses destinées ?

Tels sont les redoutables problèmes que se pose le poëte, après avoir dépeint les mondes primitifs et leurs transformations successives. Il a décrit les siècles passés, il entrevoit maintenant les siècles à venir.

La terre a disparu dans les eaux. Dans le vieux lit des mers germe un autre monde sous un nouveau soleil. La nature semble s’éveiller sur le tombeau immense des peuples : le jour est sans nuages et plein d’éblouissements, les brises sont douces. C’est bien le splendide univers qu’ont rêvé les vieux âges. Le monde a fait un pas de géant vers la perfection. Tous les êtres créés attendent joyeusement l’arrivée de leur maître.

Enfin ! le voici ! c’est lui,

… Il vient dans la lumière ! il vient dans l’harmonie !
À l’horizon lointain sa grande ombre a passé !
Et, le sentant venir, la terre rajeunie
Tremble comme la vierge au bruit du fiancé !…

Ce maître, c’est l’Homme régénéré, e cinere suo redivivus. Il a en partage la force, la sagesse et le génie ; il pénètre les secrets de la Nature, et toute la création est son amie sans être son esclave.

… Salut ! être nouveau ! génie ! intelligence !
Forme supérieure, où le Dieu peut tenir !
Anneau mystérieux de cette chaîne immense
Qui va du monde antique aux siècles à venir.

À toi les grands secrets qui, dans l’ombre et le vide,
Échappaient comme un rêve, à l’Homme épouvanté…