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SA VIE — SES ŒUVRES

dans l’Histoire qu’un décor de fond et un prétexte à une action tragique. Madame de Montarcy et même la Conjuration d’Amboise n’ont jamais eu, je suppose, la prétention d’être des drames historiques. C’est vraiment un singulier procédé que de faire circuler une action romanesque dans un milieu où certains personnages, dont la figure et les noms nous sont connus par les récits du passé, assistent à l’action comme de beaux portraits suspendus dans une chambre, témoins d’une scène dramatique. Sans doute, comme le remarquait Théophile Gautier, ils ajoutent à l’effet général en donnant à l’œuvre une certaine couleur archaïque, et le regard les contemple avec un certain plaisir dans les moments où l’action se repose. Mais le drame ainsi compris, avec un pareil entourage, avec une pareille décoration, constitue un genre bâtard où l’esprit n’est pas satisfait par les tableaux qui se succèdent, où l’action se trouve fatalement divisée, où l’intérêt est distrait des héros qui conduisent la marche du drame et qui devraient absorber toute l’attention du spectateur.

Il fallait aussi que notre poëte étudiât d’un œil plus curieux les passions humaines et cherchât des types nouveaux et plus variés. Les figures qu’il a tracées ne brillèrent pas par la diversité.

· · · · · · · · · · · · · · · · · · · · facies non omnibus una,
Nec diversa tamen · · · · · · · · · · · · · · · · · · · ·

Que si l’on vient à regarder de près ces figures, on ne tarde pas à trouver qu’elles ont parfois entr’elles un grand air de ressemblance. M. de Rouvray et don Pèdre de Torrès sont frères comme Mme de Montarcy et Mme de Brisson sont sœurs. La parenté ne doit pas être bien éloignée non plus entre elles et Dolorès, Condé est un amoureux de la famille de Fernand, et le chevalier d’Aydie placé dans les mêmes circonstances n’aurait