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SA VIE — SES ŒUVRES

des journaux de la ville, il exile notre poëte et l’envoie au diable… pour faire pénitence. Mme Dufernay, une femme pratique aussi, cherchera un autre gendre. Mais quel autre pourrait mieux lui convenir que le sage, que le sérieux Gaudrier ? Le notaire a su qu’Étienne Dufernay, l’oncle million, doit doter Alice ; à la première ouverture que lui fait Mme Dufernay, le galant renonce à Clara Roussel. Mais Alice n’aime pas le notaire ? Qu’importe ! — Pauvre Léon ! pauvre Alice ! Un rendez-vous secret les réunit bientôt. Léon, éperdu d’amour, veut renoncer à la Poésie ; mais la jeune fille l’arrête et l’engage noblement à persévérer malgré les obstacles. Léon se récrie. S’il a rêvé des succès, c’était pour se rendre digne d’Alice. Que va-t-il devenir ? — Le bon oncle million saura mettre bon ordre à tout cela. Il va se marier, annonce-t-il partout. — Se marier ! Mme Dufernay s’indigne à cette pensée. À son âge ! se marier ! Elle veut presser l’union du notaire et de sa fille. Mais Gaudrier, averti des velléités matrimoniales de l’oncle, n’entend pas de cette oreille. Une belle-mère et six mille francs de rente ! C’est trop et trop peu à la fois ! Comment rompre ? — En attendant cette pauvre Clara querelle Alice qu’elle croit coupable de lui enlever son cher notaire. Alice la calme. Qu’elle se rassure : jamais elle n’épousera Gaudrier. Le coureur de dots a déjà su simuler une maladie ; il tousse, il craint, dit-il, pour sa poitrine, il part pour les eaux. — L’oncle Étienne reparait. Les choses vont s’arranger. S’il a manifesté l’intention de se marier, c’était pour éprouver le désintéressement de Gaudrier. À cette déclaration, Mmes Dufernay et Rousset commencent à se sentir disposés à quelques concessions littéraires en faveur de Léon que l’oncle million a recueilli et protégé près des éditeurs. Ne vient-il pas de publier un volume de poésies qui en vaut bien un autre ? Un volume !