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» La position de M. Picard était cruelle ; ses demoiselles et sa femme montrent un grand courage ; elles se mettent en homme. Après une heure de marche, M, Picard demande qu’on s’arrête : son ton est celui d’un homme qui ne veut pas être refusé. On y consent, quoique le moindre retard puisse compromettre la sûreté de tous. Nous nous étendons sur le sable ; nous dormons jusqu’à trois heures du matin.

» Nous nous remîmes aussitôt en route. Nous étions au 9 juillet. Nous suivions toujours les bords de la mer ; le sable mouillé permet une marche plus facile ; on se repose toutes les demi-heures à cause des femmes.

« Sur les huit heures du matin, nous entrons un peu dans les terres pour reconnaître quelques Maures qui s’étaient montrés à nous.

» Nous rencontrons deux ou trois misérables tentes ou étaient quelques mauresses presque toutes nues ; elles étaient aussi laides et aussi affreuses que les sables quelles habitaient.

» Elles vinrent à notre secours, nous offrant de l’eau, du lait de chèvre et du millet, leur seule nourriture. Elle nous eussent paru belles, si c’eût été pour le plaisir de nous obliger. Mais ces êtres rapaces exigeaient de nous le peu que nous possédions.

» Les marins, chargés de nos dépouilles, étaient plus heureux