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» L’eau passe par dessus nos têtes et emplit la chaloupe aux trois-quarts : elle ne coule pas.

» Sur-le-champ, on déploie une voile qui nous emporte à travers les autres brisans. La chaloupe s’emplit tout-à-fait ; nous coulons ; mais il n’y avait plus que 1 mètre 50 centimètres d’eau : tout le monde se jette à la mer, et personne ne périt.

» Ainsi, je me trouvais sur la côte d’Afrique, n’ayant dans mes poches que quelques galettes de biscuit trempées d’eau salée, pour la nourriture de plusieurs jours, sans eau, au milieu d’un désert de sa)des brûlants, où errent des hommes cruels : c’était quitter un danger pour un autre plus grand.

» Nous résolûmes de suivre toujours le bord de la mer, la brise nous rafraîchissant un peu ; de plus, le sable mouillé était plus doux que le sable fin et mouvant dans l’intérieur. Avant de commencer notre route, nous attendîmes l’équipage du canot qui avait fait côte avec nous.

» Nous marchions depuis une demi-heure, lorsque nous vîmes un autre canot qui s’avançait à pleine voile : il vint échouer.

» Il renfermait toute la famille Picard, composée de Monsieur, de Madame, de trois grandes demoiselles, et de quatre petits enfants en bas-âge, dont un à la mamelle.

» Je me déshabillé et me jette à la mer pour aider cette malheureuse