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l’oubli de leur infortune, étaient dans une apathie complète et sourds à toutes les invitations ; ceux-là, qui craignaient que la chaloupe ne s’enfonçât sous un trop pesant fardeau, préférèrent attendre dans la frégate des secours inespérés ; les efforts que nous fîmes pour les faire changer de résolution furent inutiles. Il fallut les quitter, nous jetâmes un dernier regard sur cette frégate qui renfermait encore tant d’infortunés livrés aux angoisses prolongées de la mort ; nous disparûmes.

La chaloupe prit la route des autres embarcations, que nous rejoignîmes après une heure de marche. Elles faisaient encore tous leurs efforts pour remorquer le radeau.

C’est ici qu’il est nécessaire de réfuter l’opinion de M. Correard sur la conduite que les officiers de marine ont tenue à l’égard du radeau.

Il prétend que les divers canots larguèrent les remorques, et que le radeau fut ainsi abandonné par ceux qui s’étaient chargés de le conduire à terre.

Il combat avec chaleur l’explication qui a été donnée par le gouverneur, et loin d’admettre que la remorque cassa, il assure qu’il pourrait nommer celui qui largua l’amarre.

Voilà deux versions bien différentes données par deux témoins oculaires ; sans vouloir taxer M. Correard de partialité, et lui reprocher une injustice qui semblerait justifiée par les souffrances