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nous, nous fit bientôt renoncer à ce projet qui n’était d’ailleurs qu’un acte de désespoir,

C’était le brave Espiaux, lieutenant de marine, qui se dirigeait de notre côté, l’idée de sauver quelques malheureux qui étaient restés à bord de la Méduse, le désir de se procurer quelques vivres pour nourrir ceux qu’il conduisait déjà dans la chaloupe, rengagèrent à rejoindre la frégate.

M. Correard a eu tort de dire qu’il ne se comporta ainsi que par l’ordre de M. de Chaumarevs, une belle âme n’a pas besoin d’être excitée pour faite une bonne action. Le généreux Espiaux ne consulta que son cœur et l’intérêt de ses camarades. On peut juger alors des mouvements d’espérance et de la joie qui nous agitèrent. Espiaux s’avance, il nous annonce qu’il vient nous délivrer et nous recueillir tous dans la chaloupe, des pleurs s’échappent de nos yeux, nous nous jetons au cou de notre libérateur en lui jurant une éternelle reconnaissance.

Après ces premiers moments donnés aux sentiments les plus doux, on s’occupe des moyens de salut ; trois cent vingt rations de biscuit et un petit baril d’eau lurent transportés sur la chaloupe ; mais lorsqu’il fallut quitter la frégate, dix-sept individus s’y refusèrent[1]. Ceux-ci, qui avaient cherché dans l’ivresse

  1. Nous ferons connaître lorsqu’il en sera temps le sort de ces dix-sept personnes.