Page:Angellier - Robert Burns, II, 1893.djvu/214

Cette page n’a pas encore été corrigée

— 190 -

des agitations humaines devant l'inexorable problème de la mort éternelle? Bien qu'il ait vécu jusqu'en 1800, le tonnerre de la Révolution française n'a pas eu d'écho dans son œuvre. C'était un mouvement trop purement humain, trop rationaliste , pour qu'il le comprit.

C'est une autre conséquence de la même préoccupation surnaturelle, qu'il n'a pas compté parmi les croyants au progrès, parmi ceux qui voient des lueurs dans l'avenir. Il était plutôt porté à considérer le monde comme caduc et condamné. Le terme de ce globe ne lui semblait pas éloigné, et les cataclysmes terrestres qui ont marqué la fin du dernier siècle n'étaient que les avertissements de la destruction suprême ^ .

... Un monde qui semble

Tinter le glas de sa propre mort,

Et, par la voix de tous ses éléments,

Prêcher la destruction générale 2. Quand les vents

Furent-ils lâchés avec une telle mission de détruire ?

Quand les vagues ont-elles si hautainement franchi

Leurs anciennes barrières, pour inonder la terre ferme ?

Des feux au-dessus de nous, des météores sur nos têtes.

Effrayants, sans exemple, inexpliqués.

Ont allumé des signes dans les cieux , et la vieille,

La caduque Terre a eu ses accès de tremblement

Plus fréquents, et a perdu son repos accoutumé.

Est-ce l'instant de lutter quand les supports

Et les piliers de notre planète semblent manquer.

Et la Nature, avec un œil voilé et morne,

Attendre la fin de tout ? ^

11 était, on le voit, "in de l'idée moderne d'un progrès infini, sans cesse réalisé par le constant effort de l'Humanité qui subjugue la Nature et s'améliore elle-même.

Il avait bien prédit, il est vrai, qu'un repos viendrait pour ce globe si longtemps travaillé par le mal, le sabbath promis à la Terre *. La harpe des prophéties l'annonçait. Dieu descendrait dans son chariot, sur un chemin d'amour. La malédiction du chardon serait rappelée. La terre, de nouveau, serait riante de sa première abondance. Les animaux vivraient dans la concorde du Paradis Terrestre. Le globe éclaterait d'harmonie, et toutes choses remonteraient à leur perfection originelle. Ce n'est là qu'une vision religieuse et uu rêve de l'Apocalypse. Cela n'a aucun rapport avec l'idée du progrès sortant de l'humanité. Les critiques qui revendiquent

1 Voir, avec des conclusions difiërenles , mais inspiré par les mêmes catastrophes, le poème de Voltaire Sur le désastre de Lisbonne.

2 Allusion aux calamités de la Jamaïque (noie de la Globe Edition).

•î Cowper. The Task ; the Time Pièce, v. 53-65. Ces derniers vers, dit la Globe Edition, font allusion au brouillard qui a couvert l'Europe et l'Asie, pendant tout l'été de 1783.

4 Cowper. The Task ; the Winter Walk at Noon. Lire les vers de 729 à 811.