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naient ainsi des hommes qui avaient poussé dans toute leur originalité native, et qui étaient assez cultivés pour qu'elle se manifestât par l'esprit. Il n'y a peut-être pas de littérature où les gens du peuple, paysans, bergers, artisans aient fourni autant de types aux romans que la littérature écossaise, depuis les mendiants de Walter Scott jusqu'aux rudes interlo- cuteurs ih?, JVodes Âmèrosiana de iolmW'ûson, et au tailleur de iMansie WaiicJi. Dans Burns, combien n'aperçoit-on pas de ces caractères qui ne demandent qu'à venir au premier plan, à agir et à parler? le fermier Rankine, le maître d'école Davie, le vieux Lapraik, William Simpson , autre maître d'école, le marchand Goudie, James Smith, et tant d'autres. En même temps, tout le pittoresque des grand'routes subsistait encore. Mendiants, joueurs de cornemuses, colporteurs, gypsies, chanteurs de ballades , toutes ces hordes vagabondes couvraient encore les chemins. Des scènes comme celle des Joymx Mendiants étaient encore possibles. C'était un moment précieux. Cette originalité du pays n'allait pas tarder à s'affaiblir.
On imagine ce que le génie de Burns pouvait faire avec une semblable matière. On aurait eu une suite de comédies rustiques, avec des scènes comme la Veillée de la Toussaint^ comme la Foire-Sainte. Sur la foule bigarrée et grouillante, sur des fonds de foires, de marchés, d'assemblées, de funérailles, de mariages, rendus avec tous les détails précis et exacts , des scènes vivantes, agiles, pressées, pleines d'entrain, de rire ; des personnages hardis, pittoresques, goguenards, campés de main de maître. Les amoureux n'y auraient pas manqué. Des chansons auraient ajouté, comme chez les Dramaturges du règne d'Elisabeth, un élément lyrique ; et on peut affirmer que, depuis Shakspeare, jamais la poésie, la moquerie ou la joie populaires n'auraient été si bien exprimées. Elles auraient été la grâce légère et le charme de ces pièces. C'était un drame vulgaire d'une sincérité et d'une vie étonnantes, quelque chose comme les suites villageoises deTéniers, quelque chose d'unique, non-seulement dans la littérature anglaise, mais dans la littérature de tous les pays.
C'est à cela que tendait tout le génie du pauvre Burns. C'est bien l'opinion de ceux qui l'ont étudié de près. Walter Scott a dit très juste- ment : c» L'occupation d'écrire une série de chansons pour de grands recueils musicaux a dégénéré en un travail servile qu'aucun talent ne pouvait soutenir, a produit de la négligence et, surtout, a détourné le poète de son grand dessein de composition dramatique. Produire une œuvre de ce genre, qui n'eût été peut-être ni une tragédie régulière ni une comédie régulière, mais quelque chose qui eût partagé de la nature des deux, semble avoir été le vœu longtemps chéri de Burns... Aucun poète, depuis Shakspeare, n'a jamais possédé le pouvoir d'exciter les émotions les plus variées et les plus opposées par de si rapides transi- tions... Nous devons donc regretter profondément ces occupations qui