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XII —

système que d'essayer d'en faire une application précise. Prenons , par exemple, l'homme qui fait le sujet de cette étude, A chaque pas nous allons rencontrer des difficultés. Et d'abord nous ne savons pas ce que c'est que le génie de la race écossaise, ni même très clairement ce que c'est que la race écossaise, si l'on entend par ces mots autre chose qu'un certain groupe d'hommes, fort dissemblables entre eux, qui, depuis un certain temps, ont vécu entre certaines limites, parlé le même langage, et partagé des destinées communes, encore que celles-ci soient nées le plus souvent de conflits, de luttes mortelles, de di\ ergences dans les intérêts, les croyances, les souvenirs, les espérances, les conceptions politiques. Les peuples sont parfois pareils à l'équipage d'un vaisseau qui se querelle et s'égorge ; ils sont entraînés tous dans la même dérive qui n'est que le résultat de leurs dissidences et discordes. Nous avons rencontré en Ecosse des hommes blonds et des bruns, des gais et des mélancoliques, des lents et des vifs, des sensibles et d'autres durs ; chez les uns les idées procédaient par raisonnement , ce qui est , paraît-il , le privilège des races latines ; chez d'autres elles s'unissaient par bonds rapides et analogies inqirévues ; les uns étaient sceptiques, les autres absolus ; toutes les variétés de l'esprit humain y étaient. Ceux mêmes qu'on eût pu grouper par les traits physiques étaient différents d'intelligence, et souvent des esprits de même famille et de mêmes habitudes se rencontraient dans des corps ({u'ou eût rattachés à des types distincts. Oii est le génie de la race, où est la race dans cette diversité infinie de corps et de pensées? Nous savons bien qu'on peut toujours extraire de la masse des écrivains d'un peuple quelques écrivains d'où l'on extrait quelques points de ressemblance qu'on réunit entre eux. C'est là un jeu pareil à celui qui consiste, sur un fond où se mêlent et s'embrouillent une multitude de lignes, à former un dessin en en isolant et en en reliant quelques-unes ; on peut de cette façon en former à l'infini et chacun d'eux ne sera jamais qu'un amusement de l'œil. C'est ainsi que les petits garçonnets façonnent un bateau, un chapeau ou un berceau, en tirant en sens divers quelques ficelles entrecroisées tendues entre leurs doigts,

A cela s'ajoute que nous ignorons de quelle race était Burnj;, Ceux qui l'ont connu disent qu'il avait les cheveux et les yeux noirs, le teint brun et basané. A lire leur portrait on le prendrait pour un nu'ridional. On a mesuré son crâne et trouvé (fu'il était un peu au-dessus de la moyenne. Tout cela n'a rien de scientifique, ne mène à rien. Nous ignorons encore plus ce qu'étaient son père et sa mère. Celle-ci avait, dit-on, les yeux noirs et elle était née dans un canton où l'on prétend qu'il subsiste du sang celti(pie. Nous ne savons rien de son père, sauf quelques traits exception- nels de caractère. Nous sommes dans les ténèbres en ce qui concerne les ascendants des deux parents et les mille ramifications des aïeux. Quand nous aurions encore tous ces renseignements, nous ignorons si la Irans-