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l'aube au crépuscule ^ Les sermons ordinaires duraient deux heures; quelques-uns, trois, quatre ou cinq ; dans les grandes circonstances, plusieurs ministres étaient présents afin de se relayer au fur et à mesure que l'un d'eux était épuisé ^. Les sermons étaient exclusivement doctri- naux ; ils évitaient toute tendance morale et pratique ; ils portaient cons- tamment sur les mêmes points : la chute de l'homme dans Adam , son salut par le Christ , la purification par la foi , la Nouvelle-Alliance ; ils retombaient sans cesse dans les mêmes divisions, pleins d'interminables et fastidieuses répétitions"^. Le fanatisme des traditions, l'habitude de prê- cher en plein air, la lourdeur des auditeurs avaient amené un style d'élo- quence véhément, bruyant, plein de fureur et de gestes, tumultueux, une nuée d'éclairs et de tonnerre d'où le prédicateur descendait la voix brisée et le visage couvert de sueur '*.

De ces harangues furibondes tombait une doctrine de terreur et de tremblement. Pas un mot de pardon, de miséricorde ou d'espérance ; rien que des avertissements et des prophéties de souffrances éternelles ^. C'était l'esprit sauvage et dur de l'Ancien Testament; ce qu'il y a d'indulgence et de tendresse dans le Nouveau leur restait inconnu. Le divin sourire du Christ n'éclairait pas ces sombres esprits ; ils n'auraient pas compris ces mots charmants, par lesquels le désigne le plus hébraïque pourtant de nos orateurs, lorsqu'il l'appelle : « Cet enchanteur céleste ". » Dean Stanley a bien marqué le caractèrejudaïque de cette théologie : « L'immense prépondérance de l'enseignement de l'Ancien Testament et de quelques-unes des moins importantes parties de l'Ancien Testament sur l'enseignement du Nouveau et de la partie la plus essentielle du Nouveau, devait nécessairement mutiler, rétrécir et aigrir l'enseignement religieux du pays. » Celui-ci n'avait pris du nouveau Testament que l'idée de l'Enfer, et appliquant à des châtiments sans fin, la rigueur que l'ancien Testament appliquait à des châtiments corporels, ils avaient fait sortir de ce mélange une religion qui rendait éternelles les férocités de la Bible.

Un dieu terrible planait sur cette religion sinistre, juge de colère et de vengeance, un Jéhovah irrité et inexorable , dont la main était toujours levée sur le genre humain. C'est de lui que venaient les

1 Chambcrs. Domesiic Annals of Scotland , vol. III, p. 271 — Voir Ch. Rogers , Scolland, etc., p. 24.

2 Buckle. History of Civilization in England , vol. III, p. 203 et suivantes.

3 Dean Ramsay, Réminiscences^ p. 29.

4 Buckle. M., pag. 2S3. — Voir aussi dans Dean Ramsay, p. 207, l'anecdote des deux sacristains qui discutent les mérites de leurs ministres ; et page 208.

5 Buckle. /rf., tom. III , p. 238. — Voir aussi les exemples qu'il donne dans les notes.

C Bossuel.

■? Dean Stanley. Lectures on the Hislory of the Church of Scotland. Lecture ii, p. 83.