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que je ne voudrais pas dire délibérénienl une fausseté, non I quand bien même des horreurs pires encore, s'il eu existe, que celles que j'ai mentionnées, seraient suspendues sur ma tôle, et je dis que celte allégation, quel que soit le misérable qui l'a faite, est un mensonge I La Constitution anglaise, sur les principes de la Révolution, est ce à quoi, après Dieu, je suis attaché avec le plus de déA'OÛment. Vous avez été, Monsieur, vraiment et généreusement mon ami. Le ciel sait avec quelle ardeur j'ai ressenti mon obligation et avec quelle reconnaissance je vous en ai remercié. La Fortune, Monsieur, vous a fait puissant et moi faible, elle vous a donné la protection et à moi la dépendance. Je ne voudrais pas, s'il ne s'agissait que de moi-même, faire appel à votre humanité ; si j'étais seul et sans liens, je mépriserais la larme qui se forme dans mon œil ; je saurais braver le malheur, je saurais affronter la ruine ; car après tout, ^' les mille portes de la mort sont ouvertes ». Mais, ô Dieu boni les tendres intéiéls que j'ai mentionnés, les droits et les liens que je vois en ce moment, que je sens autour de moi, combien Ils énervent le courage et affaiblissent la résolution! Vous m'a\ ez accordé un titre à votre patronage, comme à un honmie de quelque mérite ; et votre estime, en tant qu'honnête homme, est, je le sais, mon droit. Permettez-moi, Monsieur, d'en appeler à ces deux sentiments ; je vous adjure de me sauver de la misère qui menace de me détruire et que, je le dirai jusqu'à mon dernier soupir, je n'ai pas méritée i. »

Quelques-uns de ses plus sincères admirateurs ont blâmé cette lettre. Ils ont trouvé qu'elle manquait de dignité ^. Elle ne manque à nos yeux ni de fierté, ni d'éloquence. C'est le mouvement et le cri d'un homme dont la famille peut être le lendemain en lace de la faim. C'est une lettre par- ticulière, à celui qui s'était toujours montré son prolecteur et son ami. Des situations à cette extrémité ne se mesurent pas par des formules de cor- respondance ordinaire. Trouve-t-on qu'un homme manque de dignité parce que sa voix tremble et que ses yeux se remplissent de larmes lorsqu'il voit souffrir les siens?

D'ailleurs la lettre qui suit montre bien quelle fut son attitude dans cette malheureuse affaire. 11 est facile de voir que M. Graham lui avait répondu pour le rassurer un peu et lui dire d'exposer sa défense dans une lettre qui serait transmise au Conseil. Burns lui renvoya, avec ses remerciments, l'exposé des faits et des opinions dont il était accusé. Il n'est guère possible de demander plus de franchise dans l'aveu de ses actes, plus de fermeté dans le maintien de ses opinions, plus de netteté et de dignité à la fois. 11 écrivait le 5 janvier 1793 :

« Monsieur, je suis à l'instant même honoré de votre lettre. Je n'essaierai pas de décrire les sentiments avec lesquels j'ai reçu celle nouvelle preuve de votre bonté.

J'arrive aux accusations que la malveillance et la calomnie ont portées contre moi. On a dit, semble-t-il, que non-seulement j'appartiens à un parti désaffectionné dans cette ville, mais encore que je suis à sa tète. Je n'ai connaissance ici d'aucun parti, ni républicain, ni réformiste, excepté d'un ancien parti en vue de la réforme des bourgs, avec lequel je n'ai jamais rien eu à faire. Des individus, républicains et réformistes,

1 To Hoberl Graham of Vinlry, Dec. 1792.

2 Voir Halely Waddell,