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« J'ai une telle armée de peccadilles f'p fanles, de folies, de chutes, (tout autre que moi pourrait peut-être leur donner un nom plus dur) qu'afln de rétablir un peu la balance, si peu que ce soit, je suis disposé à faire à l'égard d'un semblable le peu de bien qui est en mon faible pouvoir, dans le but égoïste d'éclaircir un peu la pers- pective quand je jette mes regards en arrière i. »

Tantôt ce sont, contre la société et ses jugements injustes, des empor- tements qui tiennent de la frénésie; s'attaquant à la Pauvreté, il éclate tout à coup :

Et ce n'est pas seulement la race des Vertueux qui a motif de se plaindre de loi : les enfants de la Folie et du Vice, bien qu'ils soient comme toi les lils du Mal, gémissent aussi sous ta baguette. A cause de toi, l'homme de dispositions malheureuses et d'une éducation négligée est condamné, jugé comme un sot pour ses dissipations, méprisé et repoussé conune un miséi'able indigent, (juand ses folies, comme d'habitude, l'ont conduit à la ruine ; et (juand, perdant tout principe, ses besoins le poussent à des pratiques déshonnéles, il est abhorré comme un manant et périt par la justice de son pays.

Tout différent est le sort de l'homme de famille et de fortune. Pour lui, ses jeunes extravagances et ses folies sont de la flamme et du tempérament ; ijour lui, les besoins qui en résultent sont les embai-ras d'uu brave garçon ; et quand, pour raccommoder ses affaires, il part avec une commission légale qui lui permet de piller des provinces lointaines et de massacrer des nations paisibles, quand il revient chargé des dépouilles (le la rapine et du meurtre, il vit méchant et respecté; il meurt, scélérat et lord. Bien plus I chose pire que toutes ! maliieur à la fennne sans ressources ! la pauvre nialiieureuse, qui grelotte au coin d'une rue, attendant pour gagner les gages delà |)roslitution passagère, est écrasée par les roues de la voiture qui enq)orte à un rendez-vous adultère la catin à blason, celle qui sans pouvoir invoquer les mêmes nécessités, se livre toutes les nuits au même commerce coupable ! ! !

Allons 1 les curés peuvent en dire ce qu'ils veulent, mais je soutiens qu'une bonne bouffée d'exécration est à l'esprit ce que l'ouveiture d'une veine est au corps : dans l'un et l'autre les écluses trop cliargées sont merveilleusement soulagées par leurs évacuations respectives. Je me sens bien plus à l'aise (|ue lorsque j'ai commencé ma lettre et je puis maintenant me mettre au travail -.

Quelle acrimonie s'amassait donc en son cœur pour qu'il fallût de pareilles débâcles avant qu'il se sentît soulagé? De quelle plaie secrète venait ce fiel"? Ce n'était pas là le ton ordinaire d'une critique de la société, c'était un cri de souffrance et presque de haine.

C'est qu'un drame, plus terrible, plus accablant que tous les autres, se prépare lentement. C'est un drame qui va saccager son existence et celles qui l'entourent. L'instant où il doit éclater peut être prévu; chaque jour le rapproche. Hélas ! les germes de destruction, cachés aux débuts de son mariage, ont fait leur œuvre. L'entente profonde et bienfaisante, l'accord tutélaire qui protège des faiblesses ne s'est pas établi. L'àme de l'existence

1 To llie Rev. G. H. Baird. Feb. n91.

2 7'o Pc^T /////, nll' Jon. 1791.