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Cette fréquentation de l'école de danse avec ses attraits et ses rencontres, et cette révolte, n'étaient qu'un symptôme du tumulte d'âme qui se faisait en lui. L'idylle délicate de la moisson avait jeté l'étincelle dans un cœur étrange qui se mit à flamber follement, et à tout propos, et pour toujours. Presque aussitôt commença pour Burns ce libertinage, ce vagabondage de cœur, qui est la marque de sa vie. Il semble avoir secoué sa timidité et assumé du premier coup l'audace, l'esprit d'aventure et, selon son expression, la dextérité d'un don Juan. L'amour devint pour lui une sorte d'ivresse dans laquelle il se complut dès lors.

Toute cette éclosion prit peu de temps. Juste un an après la jeune moissonneuse, il était occupé d'aventures d'un autre caractère. Vague- ment désireux sans doute d'échapper à l'existence de misère où son père s'enfonçait, il alla passer, chez un frère de sa mère, une partie de son dix-septième été, afin d'étudier sous le maître d'école du petit village de Kirkosvald, qui avait une renommée dans la contrée pour la géométrie et la levée des plans. C'était un long séjour que Burns faisait hors du regard paternel. L'endroit était mal choisi. Toute cette côte du district de Carrick était infestée de contrebande qui se faisait avec l'île de Man, nid de contrebandiers. « Ce fut cette année-là, dit M. Balwhidder dans Le^ Annales de la Paroisse, que la grande extension de la contrebande corrompit toute la côte ouest, spécialement les basses terres dans les environs de Troon et de Loans. Le thé passait comme paille de blé, l'eau-de-vie comme eau de puits, et le gaspillage de toutes choses était terrible. On ne s'occupait plus que des porte-balle, qui passaient à cheval dans le jour, et des gens de l'excise, dans la nuit, — et des batailles entre les contrebandiers et les gens du roi, sur terre et sur mer. Il y eut une débauche et une ivrognerie continuelles, et notre paroisse, qui n'était qu'au bord de ce tourbillon d'iniquités, passa des moments terribles ^ » Burns trouva là des brutalités et des audaces nouvelles , les orgies lourdes et âpres de cette populace de receleurs et de smuggleurs. Il se mêla à eux, prit part à leurs séances de cabarets. Ce n'était pas seulement l'attrait de ces beuveries, mais plus encore son désir d'observation, d'étudier les caractères, qui se montrait déjà en lui. Il se trouva là avec des types nouveaux et bien marqués. Enfin il mélangea à tout cela une intrigue dont le ton si différent de celui de l'année précédente montre bien le chemin parcouru.

i Une autre circonstance fie ma vie, qui produisit des a1t(rations considérables sur mon esprit et mes mœurs, fui que je passai mou dix-seplième éléàune bonne distance de la maison, sur une côte de contrebandiers, à une école connue, pour apprendre la mensuration, l'arpentage, l'art d'employer les cadrans etc., où je fis d'assez bons progrès. Mais je fis de plus grands progrès dans la connaissance du genre humain.

1 John Galt. The Annals of the Parisb. Ghap. n. Year 1761.