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Adieu collines et vallons de la vieille Coila,

Ses nioors couverts de bruyère, ses vallées tortueuses,

Les scènes où ma malheureuse imagination erre,

l'oursuivant les amours passées et mallieureuses !

Adieu mes amis, adieu mes ennemis,

Mon pardon aux uns, mon amour aux autres.

Les larmes qui jaillissent trahissent mon cœur ;

Adieu les jolis bords de l'Ayr I i

Il continua à songer au départ jusqu'à la fin d'octobre, car il en parle encore dans une épître adressée au major Logan le 30 de ce mois. C'est seulement dans les premiers jours de novembre que ses amis, comme M. Ballantine d'Avr , chagrinés de le voir toujours sur le point de partir, semblent l'avoir poussé à aller à Edimbourg essayer d'y publier cette seconde édition. Ils pensaient probablement que, s'ils gagnaient du temps, il y avait chances pour que l'exil de Burns fût évité. En même temps, il est impossible qu'il ne fût pas informé que les journaux, le Magazine d'Edimbourg, s'étaient occupes de lui et avaient fait grand cas de ses poèmes.

»■ Un exemple frappant de génie naturel éclatant à travers l'obscurité de la pau- vreté et les obstacles d'une vie laborieuse — A ceux qui admirent les créations d'une imagination libre et qui ferment les yeux sur de nombreuses fautes, en tenant compte de beautés sans nombre, ses poèmes donneront un singulier plaisir. Ses observations du caractère humain sont pénétrantes et sagaces et ses descriptions sont vives et justes. Il y a un riche fonds de plaisanterie rustique, et quelques-unes des scènes tendres sont touchées avec une délicatesse inimitable. Le caractère qu'Horace donne à Osellus lui est particulièrement applicable :

Rusiicus abnormis sapiens crassaque Minerva 2.

Le critique ne s'apercevait pas que les œuvres de Burns étaient autrement parfaites et achevées que les œuvres des poètes à la mode, à commencer par Blair. Mais c'était beaucoup déjà que cette admiration, même un peu à côté.

Toutes ces raisons combinées firent que Burns prit une grave résolu- tion ; vers le commencement de novembre, il se décida à partir pour Edimbourg, à aller tenter sa fortune dans une ville inconnue, la capitale intellectuelle de l'Ecosse et, on peut le dire, à cette époque-là, de l'Angleterre. Il se lançait brusquement vers un avenir nouveau dont il n'avait pas la moindre idée quelques semaines auparavant. C'était une décision qui devait avoir une influence considérable sur son avenir, un des tournants importants de sa vie.

1 Tlic Gloomy Nioht ts (jnlhiring fast.

■2 The Edinburgh Mugazinc for October, cité par Chambers, tom I, p. 336.