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ferme teneur de ma résolution ; mais si des circonstances ennemies m'empêchaient, d'accepter votre offre bienveillante, ou si l'accepter menaçait de m'attirer de nouvelles misères — i •

La lettre coupée, inachevée, trahissait l'état d'incertitude et d'émotion douloureuse oii il se trouvait alors. Le temps passait sans qu'il prît de résolution et sans que la pensée du départ quittât son esprit.

Il se produisit alors un événement qui l'en chassa définitivement et eut sur sa destinée future une importance décisive. Il l'a rappelé lui-même en ces termes :

« J'avais fait mon dernier adieu à quelques amis ; ma malle était sur le chemin de Greenock ; j'avais composé une chanson La Nuil ténébreuse s'épaissit rapidement, qui devait être le dernier effort de ma muse en Calédonie, quand une lettre du D' Blacklock à un de mes amis renversa tous mes projets, eu éveillant mou ambition poétique. Le docteur appartenait à une classe de critiques dont je n'aurais pas osé espérer l'approbation. Son idée que je rencontrerais des encouragements pour une seconde édition m'enflamma tellement que je partis aussitôt pour Edimbourg, sans une seule connaissance dans la ville et sans une seule lettre de recommandation 2. .

Les choses ne se passèrent pas tout à fait aussi simplement que Burns le raconte à distance et dans une lettre où les événements de sa vie devaient être ramassés en quelques mots. Même ce départ pour Edim- bourg ne fut pas sans ses incertitudes et ses difficultés. Tout ce passage de la vie de Burns est encore intéressant à suivre de près.

A quelques milles de Mossgiel se trouve la paroisse de Loudon, dont le ministre était alors le Rév. George Lawrie. C'était un homme de culture et de goût littéraires. Il avait des relations dans la société intellectuelle d'Edimbourg. C'était un ami de Blair et de Robertson. Par une rencontre assez curieuse, il avait été l'intermédiaire par lequel les fragments de Macpherson avaient été soumis à Blair, qui avait appelé sur eux l'attention publique. Lawrie avait lu les poèmes de Burns avec la surprise et l'admiration qu'ils causaient à tous ceux entre les mains desquels ils tombaient. Bien qu'il ne connût pas le poète, il les envoya à un de ses amis, le docteur Blacklock, qu lui en demandant son avis et en insinuant qu'il pourrait les communiquer à Blair, alors connu comme le premier critique du temps.

C'est une figure vénérable et touchante que celle du D Blacklock et qui vaut un crayon d'un instant. Né en 1721 , il avait perdu la vue à l'âge de six mois, par suite de la petite vérole, si implacable alors. Son père, un maçon pauvre, avait entrepris d'instruire lui-même du mieux

1 To Robert Aiken, 8th October n86.

2 Aulobior/raphical Lelicr to D^ Moore.