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Si elle était arrivée comme une jeune paysanne revêtue par hasard d'un manteau magnifique , comme elle est transformée ! elle s'éloigne vraiment déesse. Par un art subtil, cette Vision, qui pour sembler vrai- semblable avait dû faire une entrée familière, s'est transfigurée en une lumineuse et bienfaisante protectrice. Le pauvre paysan qui s'est tout à l'heure laissé choir sur un escabeau, harassé de labeurs, de regrets et de soucis, est maintenant consolé, raffermi. Malgré tout, en dépit de tes fautes, pauvre Robert Burns, tu as bien fait ! tu as choisi le vrai chemin ! tu as abandonné la fortune pour la gloire. Et encore que tu aies fait saigner quelques cœurs — en quoi tu as failli surtout — rassure-toi même sur cela ; tant de cœurs que tu consoleras plus tard feront que tu seras pardonné. Lève-toi donc et mène ta vie ! Elle sera ce qu'elle voudra, elle n'aura pas été en vain. La déesse ne t'a pas trompé. Lève-toi donc, va, laboure, sème, fauche sous les grésils, les vents et les soleils, sois malheureux et quelquefois coupable; tu as désormais au front un rameau invisible.

IIL

LES ORAGES DU CŒL'R. — JANE ARMOUR. — MARY CAMPBELL.

Cette puissante explosion contre la rigueur du clergé et l'hypo- crisie de certains dévots , sa production littéraire , la conscience de son génie qui s'éveillait en lui, la fierté et l'ambition qui, à sa suite, entraient dans son âme et l'emplissaient de rayons, ne sont qu'une partie de son histoire pendant ces années qui foisonnent d'événements. Les aventures du cœur toujours tiennent une grande place dans sa vie ; celles qui se sont succédé pendant son séjour à Mossgiel ont eu une telle influence sur sa destinée, et elles sont si étroitement liées à la naissance de plusieurs de ses plus belles pièces , que son sort resterait incompris et quelques-unes de ses œuvres inexplicables, si on n'étudiait avec détails ce curieux passage de l'histoire de ce cœur, pourtant si pleine de surprises.

Il est certain qu'il eut là comme ailleurs plusieurs de ces sous-intrigues d'amour dont parlait Gilbert. On en retrouve la trace dans ses vers : que ce soient des attendrissements de quelques jours ou de quelques heures comme dans les pièces à Idjeiim Pfggy, la Fille de Ballochmyl: ; ou des rapports plus étroits et plus prolongés comme dans la pièce àElisa. Il continuait son jeu de séducteur ; il en indique lui-même la méthode et le danger dans des vers bien précis :

laissez là les romans, jolies filles de Mauchline, Vous êtes plus en sûreté à votre rouet;