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strophes qui annoncent l'entrée de la vision sont parfaites de grâce et de réalité ; un autre poète aurait dépeint cette apparition sous la forme d'une allégorie, quelque chose comme une statue de monument puhlic, très majestueuse et très banale. Mais Burns portait le vrai en ses moelles et ses extases elles-mêmes étaient faites de réalité. Aussi c'est une jolie fille qui lui apparaît, modeste, gracieuse et belle, mais, sous ses vêtements féeri(iues, vivante, une des filles bien prises du pays d'Ayr. Avec un jugement sûr, il a choisi le vrai symbole de sa poésie :

Quand , click ! la ficelle tira le loquet.

Et, dgi ! la porte alla frapper le mur.

Et je vis , à la flamme de mon foyer

Toute brillante maintenant,

Une jeune fille étrangère, bien prise, jolie,

M'apparaltre en plein.

Vous ne doutez pas que je retins mon souhait ;

Mon jeune serment à moitié formé fut étouffé ;

Je regardais effaré, comme si j'avais été effrayé

Dans quelque gorge sauvage,

Quand, doucement, comme la modeste vertu, elle rougit

Et elle entra.

Des branches de houx, vertes, minces, avec leurs feuilles,

Etaient tordues gracieusement autour de son front;

Je la pris pour quelque muse écossaise ,

D'après cet emblème ,

Venue pour arrêter ces vœux imprudents

Qui eussent été vite brisés.

Une expression légère, sentimentale, Etait fortement marquée sur sa face, Une grâce rustique, farouche et fine.

Brillait sur elle,

Ses yeux, même fixés dans le vide,

Brillaient clairement d'honneur.

Sa robe — en tartan brillant — coulait, descendait ,

Laissant voir simplement la moitié de sa jambe ;

Et quelle jambe ! ma jolie Jane

Seule aurait la pareille.

Si droite, si effilée, si bien prise, si nette;

Aucune autre n'en approchait.

On reconnaît bien là l'amateur de beauté féminine , qui ne peut se tenir, en voyant même sa muse, de regarder si elle a la jambe bien faite. Qui sait ? Ces fous de poètes seraient peut-être moins épris de la gloire, si à l'origine les hasards du langage en avaient fait un mot masculin.

Par dessus sa robe de tartan, c'est-à-dire de cette étoffe quadrillée qui