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Enfin j’ai rassemblé, dans un petit monceau,
Un peu de terre autour de ce frêle rameau ;
Et maintenant qu’il vive et lentement grandisse !
Des ans s’écouleront avant qu’il ne verdisse
Au dessus des buissons de ce sol âpre et sec.
Je ne l’ignore point ; le vieux poète grec
Qui chanta
Les Travaux, sur une lyre nue,
Dont ses doigts, lourds encor de guider la charrue,
Tiraient de rudes sons, dit que nul n’a goûté
Le fruit d’un olivier par lui même planté.
Il dit vrai ; même si des mains jeunes encore
Ont mis, dans une terre où tout désire éclore,
Un rejeton plus grand, plus fort que celui-ci,
Quand les fruits tomberont autour du tronc grossi,
Elles ne tiendront pas la première corbeille.
Et moi qui vois blanchir ma tête déjà vieille,
En qui le souvenir a recouvert l’espoir,
Et qui pose le pied dans les ombres du soir,
Comment puis-je espérer contempler la richesse
Que l’automne mettra dans la ramure épaisse
Qu’un long effort secret vers un orgueil tardif
Fera sortir un jour de ce rameau chétif ?
Avant qu’à la hauteur de mon front ne s’érige
Le plus rapide et haut bourgeon de cette tige,